Les César ont sacré vendredi le roi de l'humour acide et absurde, Albert Dupontel, pour 'Adieu les Cons'. La 46e cérémonie des récompenses du cinéma français a été marquée par des cris de détresse du secteur culturel et la volonté de célébrer la diversité.
'Adieu les Cons' d'Albert Dupontel décroche sept trophées au total. Le réalisateur, qui remporte pour la première fois à 57 ans le 'meilleur film', est le grand gagnant de cette soirée.
Cette comédie de l'acteur et cinéaste, qui a brillé par son absence vendredi soir à l'Olympia, a également enlevé le César du meilleur réalisateur, du meilleur second rôle masculin (Nicolas Marié) et a été le choix des lycéens.
Le grand déçu de la soirée sera probablement Emmanuel Mouret, qui partait favori avec treize nominations pour 'Les choses qu'on dit, les choses qu'on fait' et repart bredouille, tout comme François Ozon ('Eté 85'), habitué à être nommé et à repartir les mains vides.
Calamy et Bouajila
Côté interprètes, Laure Calamy a été sacrée meilleure actrice pour 'Antoinette dans les Cévennes' et son personnage de randonneuse débutante, accompagnée d'un âne, qui a enchanté les foules entre les deux confinements.
Sami Bouajila, lui, a remporté le César du meilleur acteur pour 'Un fils', de Mehdi Barsaoui, où il joue le rôle d'un père déchiré. 'J'ai souvent l'impression que les rôles nous choisissent, plus qu'on ne les choisit', a-t-il déclaré en recevant son prix. Il a expliqué, comment le tournage dans le désert tunisien lui avait rappelé les récits d'enfance de son propre père.
Il succède à Roschdy Zem, couronné l'an dernier. Président cette année d'une cérémonie très attendue sur les questions de diversité, ce dernier avait ouvert les festivités en soulignant que 'le métier change'. 'Les règles du jeu changent, non pas pour que le jeu s'arrête, mais pour jouer à égalité cette fois', avait-il déclaré.
Les premières récompenses ont, d'ailleurs, d'emblée marqué un changement d'ère avec Jean-Pascal Zadi et Fathia Youssouf, deux acteurs noirs, sacrés meilleurs espoirs.
Naufrage en 2020
Le premier, meilleur espoir masculin, est l'auteur, réalisateur (avec John Wax) et acteur principal de 'Tout simplement noir', une comédie qui s'attaque aux clichés racistes. Cet ovni cinématographique qui, selon lui, parle 'avant tout d'humanité' a cartonné sur les écrans.
'Chaque génération doit trouver sa mission, l'accomplir ou la trahir', a déclaré Jean-Pascal Zadi en recevant son prix, citant le penseur Frantz Fanon.
Pour les César, institution-phare du cinéma français longtemps minée par les accusations d'entre-soi et d'opacité, qui avait fini de faire naufrage l'an dernier lors du couronnement de Roman Polanski, cette nomination est très symbolique.
D'autant qu'elle est venue juste après celle de Fathia Youssouf, couronnée à seulement 14 ans, pour 'Mignonnes', un film sur l'adolescence à Paris, entre traditions d'une famille polygame sénégalaise et réseaux sociaux.
Nue sur scène
Outre ces questions, la grande préoccupation de la soirée a évidemment été la crise sanitaire. La scène a servi à plusieurs reprises de tribune pour crier le désespoir du monde de la culture.
'No culture, no future' sur le ventre, 'rends-nous l'art, Jean' sur le dos: la comédienne Corinne Masiero, alias capitaine Marleau sur le petit écran, a marqué les esprits en ôtant un costume de Peau d'Ane sanguinolent, se retrouvant entièrement nue sur la scène pour remettre le prix du meilleur costume.
'Maintenant, on est comme cela, tout nus', a-t-elle lâché, tampons hygiéniques usagés aux oreilles, souhaitant soutenir notamment les intermittents du spectacle.
'Mes enfants peuvent aller chez Zara et pas au cinéma... C'est incompréhensible! On a besoin d'une volonté politique pour que le cinéma continue d'évoluer. Vous devez porter cette responsabilité en tant que ministre', a aussi déclaré Stéphane Demoustier, en recevant le César de la meilleure adaptation pour 'La fille au bracelet', à l'intention de la ministre de la culture Roselyne Bachelot.
La 46e cérémonie des César a aussi été l'occasion de rendre hommage aux artistes disparus, dont Jean-Pierre Bacri, décédé en janvier. La troupe du Splendid a, quant à elle, reçu un César anniversaire.
/ATS