Des milliers de Thaïlandais ont couru dimanche à Bangkok 'contre la dictature'. Il s'agit de la plus grande manifestation anti-régime depuis le coup d'Etat de 2014 qui a porté au pouvoir le général Prayut Chan-O-Cha, désormais à la tête d'un gouvernement civil.
Quelque 10'000 personnes, dont de nombreux jeunes, se sont rassemblées avant l'aube dans un parc de la ville, d'après les organisateurs. Ils ont scandé des slogans pro-démocratie, demandant de 'dégager Prayut' et exécutant avec trois doigts le signe de ralliement des partisans d'En avant l'avenir, l'un des principaux partis d'opposition.
'Vous pouvez voir la colère des gens (...) Je pense que c'est la première étape d'un changement général en Thaïlande', a déclaré à l'AFP le milliardaire Thanathorn Juangroongruangkit, à la tête de ce parti qui participait à cette 'course contre la dictature'.
Troisième force
Lors des législatives de mars, sa formation est devenue la troisième force politique du pays avec plus de 6 millions de voix, en particulier celles de jeunes Thaïlandais inquiets du rôle joué par l'armée en politique.
Prayut Chan-O-Cha, grâce au soutien d'un Sénat nommé entièrement par les militaires, a remporté le scrutin, mais ne dispose que d'une faible majorité parlementaire.
'L'économie est en crise. Les libertés politiques ne sont toujours pas au rendez-vous'. La population 'ne supporte plus l'inefficacité de ce gouvernement', a estimé Pannika Wanich, porte-parole d'En avant l'avenir (Future Forward), également présente à la course.
Aucune manifestation n'avait connu une telle ampleur depuis le coup d'Etat de 2014, mais un rassemblement en décembre à l'appel de Thanathorn Juangroongruangkit avait déjà réuni quelques milliers de personnes.
Attaques judiciaires
Depuis son ascension fulgurante, le jeune leader charismatique a fâché les militaires ultraroyalistes avec ses appels à la fin de la conscription et à la réduction des budgets de défense. Il est la cible d'attaques incessantes de la part des autorités judiciaires avec de multiples procédures à son encontre. Il a été déchu en novembre de son mandat de député.
Dans une autre affaire, son parti, accusé d'avoir tenté de renverser la monarchie constitutionnelle, pourrait être dissous le 21 janvier, une menace qui, si elle se concrétise, mettra hors du jeu politique les 80 députés du mouvement. Thanathorn Juangroongruangkit soutient que les accusations contre lui et En avant l'avenir sont politiquement motivées.
Entre 3000 et 4000 partisans du gouvernement ont de leurs côtés participé dimanche matin à une marche pour défendre le Premier ministre. 'Nous aimons notre pays, nous aimons un gouvernement qui peut assurer la sécurité', a déclaré Vasuchart, 68 ans.
Près d'un an après des législatives soupçonnées d'irrégularités, la Thaïlande, qui a connu plus d'une dizaine de coups d'Etat depuis l'abolition de la monarchie absolue en 1932, reste profondément divisée.
/ATS