La longue attente des résultats de l'élection présidentielle a commencé à la fermeture des bureaux de vote dimanche soir en République démocratique du Congo (RDC). Les candidats d'opposition ont dénoncé des irrégularités.
Quatre personnes ont par ailleurs été tuées dans le Sud-Kivu, où un agent électoral a voulu bourrer les urnes en faveur du dauphin du président sortant Joseph Kabila, Emmanuel Ramazani Shadary, a accusé un proche du candidat de l'opposition Félix Tshisekedi.
Files d'attente interminables, machines à voter en panne et pluies torrentielles ont perturbé l'élection. Quarante millions d'électeurs étaient appelés à désigner le successeur de Joseph Kabila, au pouvoir depuis l'assassinat de son père, en 2001, auquel la constitution interdit de briguer un troisième mandat consécutif.
Le scrutin pourrait donner lieu à la première alternance démocratique de l'histoire de la RDC. Mais il pourrait aussi déboucher sur des violences.
Opposant favori des sondages
'J'ai déjà gagné. Je serai élu. C'est moi le président à partir de ce soir', avait d'ailleurs affirmé le candidat du pouvoir, Emmanuel Ramazani Shadary, dès le matin en sortant d'un bureau de vote. Un sondage a pourtant donné cette semaine le dauphin perdant face au candidat d'opposition Martin Fayulu.
Les résultats provisoires ne doivent être connus que samedi prochain, d'après la commission électorale nationale indépendante (CÉNI). Le compte à rebours a commencé par le comptage manuel des voix de Kinshasa à Goma et de Lubumbashi à Tshikapa.
De violentes manifestations ont éclaté cette semaine après l'annulation du scrutin dans trois fiefs de l'opposition, en raison de l'épidémie de fièvre Ebola et de violences ethniques dans le Nord-Ouest.
A Béni, l'un des foyers de l'épidémie, des dizaines d'habitants décidés à voter se sont toutefois présentés dimanche et ont exprimé leur choix sur des feuilles volantes, rapporte un représentant local de la société civile.
A Goma, les agents électoraux suivent scrupuleusement le mode opératoire sous l'oeil attentif et fatigué des témoins des candidats. Les trois parties de chaque bulletin de vote sont détachées pour constituer trois piles, une pour chaque scrutin (présidentiel, législatif et provincial).
Machines à voter
La conférence épiscopale nationale du Congo estime que 'le climat général du déroulement du vote a été relativement calme'. Les incidents portent sur des 'dysfonctionnements de la machine à voter', l''interdiction d'accès ou expulsion des observateurs des bureaux de vote' ou le même sort réservé aux 'témoins' des candidats.
Objet de toutes les polémiques depuis plus d'un an, la machine à voter a connu de nombreux couacs dimanche. 'Il n'y a pas de machines et les quelques machines qui sont là, elles ont des problèmes, elles ne marchent pas, et nous n'avons pas de matériel électoral', a déclaré Pesible, un électeur à Kinshasa.
Le vote 'avec la machine est très compliqué. J'ai appuyé sans trop savoir pour qui. Je n'ai pas vu le numéro ni le visage de mon candidat', regrette Madeleine, une femme d'un âge avancé en sortant de l'isoloir d'un bureau de vote du quartier populaire de Ndjili.
Les électeurs qui ont pu voter ne cachaient pas leur enthousiasme et leur soif d'autres horizons. 'Parce que le Congo a trop souffert nous méritons le changement', résume un électeur à Goma, Patrice Nzanzu, technicien.
Violences
Kinshasa a refusé toute aide logistique de l'ONU, présente depuis 20 ans au Congo, de même que toute mission d'observation occidentale. Le pouvoir a annoncé la fermeture de ses frontières terrestres, lacustres et fluviales le jour du vote avec ses neuf voisins, de Brazzaville à l'Angola en passant par le Rwanda.
En revanche, Internet n'était pas coupé, contrairement à ce qui se passe lors des journées de fortes tensions.
La campagne avait été rattrapée par la violence, avec une dizaine de morts selon une association de défense des droits de l'homme, ce que nie le pouvoir.
Samedi soir, les deux candidats de l'opposition ont refusé de signer un document destiné à prévenir les violences postélectorales, en claquant la porte d'une médiation conduite par des observateurs africains.
/ATS