Le chef de l'Etat vénézuélien Nicolas Maduro s'est dit prêt vendredi à rencontrer le 'président' autoproclamé Juan Guaido. L'offre a été rejetée par l'opposant qui a appelé les Vénézuéliens à poursuivre la mobilisation pour réclamer le départ du dirigeant socialiste.
Pour sa première apparition publique depuis son autoproclamation comme 'président en exercice', le jeune chef du Parlement a maintenu la pression contre le régime. Il a appelé à une nouvelle 'grande mobilisation' des opposants la semaine prochaine.
'Ceux qui croient que nous nous sommes dégonflés vont être frustrés, car il y a des gens dans la rue pour un moment, jusqu'à ce que cesse l'usurpation et qu'il y ait un gouvernement de transition et des élections libres', a déclaré Juan Guaido devant des centaines de partisans à sur une place de Chacao, un quartier de l'est de Caracas. La date exacte du rassemblement devrait être connue dimanche.
'Faux dialogue'
Au même moment, le président en place, Nicolas Maduro, s'est dit prêt, en conférence de presse, à rencontrer l'opposant de 35 ans pour engager un 'dialogue national'. ' Personnellement, si je dois aller voir ce garçon (...) j'y vais', a-t-il lancé.
Une proposition sèchement rejetée par M. Guaido. Ce dernier a affirmé qu'il ne participerait à aucun 'faux dialogue' avec le gouvernement. 'La répression, quand elle ne donne pas de résultat, se transforme en un faux dialogue', a déclaré l'opposant, qui a passé les deux derniers jours dans un endroit tenu secret à Caracas.
Peu avant, le Mexique, un des rares pays d'Amérique latine n'ayant pas reconnu Juan Guaido, a proposé d'accueillir les deux protagonistes de la crise pour entamer des discussions. 'Si les parties le demandent, nous sommes les mieux placés pour les aider afin qu'il y ait un dialogue', a déclaré le président de gauche Andrés Manuel Lopez Obrador.
'Corridor d'évacuation'
Mercredi, des dizaines de milliers d'opposants étaient descendus dans la rue pour réclamer la mise en place d'un gouvernement de transition et l'organisation d'élections libres. Ces mouvements de protestation contre le régime ont fait 26 morts en quatre jours, selon l'ONG Observatorio Venezolano de Conflictividad Social.
Et plus de 350 personnes ont été arrêtées cette semaine lors de ces manifestations, 'dont 320 pour la seule journée du 23 janvier', a précisé la Haut-commissaire aux droits de l'homme de l'ONU, Michelle Bachelet, qui a réclamé des 'discussions immédiates pour désamorcer une atmosphère de plus en plus inflammable'.
Jeudi, Juan Guaido a laissé entrevoir une porte de sortie à Nicolas Maduro, en évoquant une éventuelle amnistie. Interrogé sur la possibilité d'une amnistie bénéficiant au président vénézuélien, il a répondu : 'Nous ne pouvons rien exclure, cependant nous devons être très fermes à l'avenir (...) avant tout pour faire face à l'urgence humanitaire'. Le Parlement avait promis le 15 janvier une 'amnistie' aux soldats qui ne reconnaîtraient pas le gouvernement Maduro.
Le vice-président brésilien Hamilton Mourao, dont le pays figure parmi ceux ayant reconnu Juan Guaido comme président, a proposé la création d'un 'corridor d'évacuation' afin d'exfiltrer Nicolas Maduro. Juan Guaido a déjà été reconnu par les Etats-Unis puis par plusieurs pays d'Amérique latine et par le Canada.
Comportement 'inadmissible'
Nicolas Maduro peut toutefois compter sur le soutien de l'armée, réaffirmé jeudi par la voix de son ministre de la Défense, le général Vladimir Padrino. 'Il ne fait aucun doute que c'est Donald Trump lui-même qui veut imposer de facto un gouvernement', a aussi lancé le dirigeant socialiste, également soutenu par Pékin et Moscou.
Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a dénoncé la 'politique destructrice' des Etats-Unis dans le pays. 'Nous voyons tous des appels ouverts à un coup d'Etat', a-t-il poursuivi, dénonçant un comportement 'inadmissible' et contraire à la Charte de l'ONU.
L'Union européenne, qui considère comme illégitime le deuxième mandat de Maduro, prépare une 'déclaration commune' appelant à la convocation rapide d'élections, faute de quoi plusieurs capitales plaident pour franchir le pas d'une reconnaissance de l'opposant Juan Guaido comme 'président par intérim', selon des sources diplomatiques à Bruxelles.
La Suisse suit attentivement l'évolution de la situation au Venezuela. Elle se tient à disposition pour d'éventuels efforts de médiation, a déclaré vendredi Ignazio Cassis devant la presse à Davos.
L'aggravation de la crise intervient en pleine débâcle économique dans ce pays pétrolier, jadis prospère et désormais frappé par d'importantes pénuries de nourriture et de médicaments, et soumis à une hyperinflation qui devrait atteindre 10'000'000% en 2019.
/ATS