Présidence bosnienne: un nationaliste crie victoire chez les Serbes

Le nationaliste Milorad Dodik a proclamé dimanche soir sa 'victoire claire' pour le poste de ...
Présidence bosnienne: un nationaliste crie victoire chez les Serbes

Présidence bosnienne: victoire du nationaliste serbe Dodik

Photo: KEYSTONE/AP/DARKO VOJINOVIC

Le nationaliste Milorad Dodik a emporté dimanche le siège réservé aux Serbes dans la présidence collégiale tripartite de Bosnie. En revanche, chez les Croates, le nationaliste Dragan Covic a été battu par le social-démocrate Zeljko Komsic.

Après une campagne menée sur une ligne communautaire, Milorad Dodik va coprésider un pays divisé, qu'il a qualifié par le passé de 'raté' et qui n'est, à ses yeux, 'pas un Etat'. Avec 55,15% des voix, il devance son adversaire centriste Mladen Ivanic (41,98%), selon la commission électorale.

Le candidat du principal parti bosniaque (musulman), le SDA (conservateur), Sefik Dzaferovic, a remporté 37,9% des voix bosniaques, après une campagne également menée sur une ligne identitaire. Chez les Croates, le candidat de la droite nationaliste, Dragan Covic (38,66%), a en revanche été battu par le social-démocrate Zeljko Komsic (49,47%).

'Décomposition de la Bosnie'

La présidence collégiale est notamment en charge des politiques étrangère et de défense, l'essentiel du pouvoir, notamment la police, l'éducation ou la politique économique, étant entre les mains des deux entités qui forment le pays, la République des Serbes de Bosnie (Republika Srpska) et la Fédération croato-musulmane de Bosnie et Herzégovine.

Mais Milorad Dodik, qui dirige la Republika Srpska depuis 2006, pourrait désormais utiliser sa nouvelle position pour 'oeuvrer à la décomposition de la Bosnie', redoute l'analyste Tanja Topic.

Dotées d'une grande autonomie, les deux entités sont reliées par un faible Etat central, incarné par la présidence collégiale tripartite. Les Bosniaques (musulmans) représentent plus de la moitié des 3,5 millions d'habitants, pour un tiers de Serbes (orthodoxes) et 15% de Croates (catholiques).

Les accords de Dayton de 1995, sur lesquels est fondée la constitution du pays, ont mis en place une vaste administration et un partage du pouvoir entre les trois communautés qui compliquent la composition du gouvernement et la mise en place d'une ligne politique claire.

Si le vote de dimanche s'est déroulé sans incident notable, selon la commission électorale, il pourrait être suivi par des mois de tractations compliquées pour former un gouvernement central, qui doit comporter des représentants des trois 'peuples constitutifs'.

D'autant que plusieurs forces politiques pourraient choisir de bloquer le processus. C'est notamment le cas de la droite nationaliste croate, autour de Dragan Covic, qui réclame une entité propre pour les Croates. S'ils ont été battus pour la présidence, elle pourra s'appuyer sur ses députés.

Listes électorales problématiques

Plus de deux décennies après la guerre civile (1992-1995), durant laquelle plus de 100'000 personnes ont été tuées et plus de deux millions déplacées, les différents partis ont fait campagne avec des programmes nationalistes, usant d'une rhétorique qui a rappelé le passé sombre de la région, qui risquerait d'éloigner le pays d'une adhésion à l'Union européenne.

Selon l'analyste politique Zoran Kresic, lassés 'des mêmes histoires, des messages guerriers et de l'impossibilité à vivre ensemble (...) la plupart des jeunes voient leur avenir en dehors de la Bosnie'. Le revenu moyen du pays est de 430 euros et le chômage touche de 20% à un tiers des habitants, selon les critères retenus.

Dans un rapport récent, l'ONG Transparency International détaillait les irrégularités électorales lors des élections locales de 2016, notamment la promesse d'embauche aux électeurs dans les entreprises publiques, tenues par les partis. Avec l'administration, elles pèsent pour 25% des emplois du pays.

Les listes électorales sont notamment sujettes à caution. Elles comptent 3,3 millions d'électeurs, soit à peine moins que le nombre d'habitants, et un million de plus qu'en 2004. 'Est-ce que l'on meurt dans ce pays?', ironise Amer Bekan, président d'un petit parti.

/ATS
 

Actualités suivantes