La Suisse, c'est connu, figure en tête de bon nombre de classements en matière de recherche et d'innovation. Mais les défis se multiplient pour rester au sommet. Un rapport, présenté mercredi par Johann Schneider-Ammann, donne pour la première fois une vue d'ensemble.
Intitulé 'Recherche et innovation 2016', ce rapport de 236 pages aborde les différentes facettes de la capacité d'innovation de la Suisse. Il passe en revue les acteurs, le financement, le positionnement international et les problèmes qui freinent la recherche. 'En Suisse, l'innovation est incontournable', a relevé le chef du Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche (DEFR).
La Suisse est souvent enviée: elle fait partie des pays qui investissent le plus dans la recherche et le développement par rapport au produit intérieur brut (PIB). Elle dispose d'une main-d'oeuvre qualifiée restreinte du fait de la taille de son bassin de population, mais sait s'attirer les talents étrangers.
Elle soigne de multiples réseaux scientifiques et économiques aux niveaux local et régional qui intègrent tant les Ecoles polytechniques fédérales (EPF) que les universités, les HES, les grandes entreprises et les PME. Ces dernières sont d'ailleurs en moyenne plus innovantes qu'ailleurs dans le monde.
Enfin, les conditions cadre sont assez souples: ce sont les entreprises ou les instituts qui se lancent dans des projets et assument les risques. Les soutiens publics ne fonctionnent qu'à titre d'encouragement. Reste que la recherche est un domaine hautement compétitif qui évolue très vite.
Libre circulation des chercheurs
La Suisse n'est donc pas à l'abri, selon le rapport. Et de citer notamment la collaboration de la Confédération aux programmes européens Horizon 2020 ou Erasmus+ dont la poursuite n'est pas encore garantie. Elle dépendra de la solution trouvée à l'initiative sur l'immigration de masse acceptée le 9 février 2014.
Or la participation helvétique à des programmes internationaux n'a cessé de croître entre 1992 et 2013. Les subsides qui vont avec ont suivi la même tendance. Cette épine dans le pied de la politique suisse pourrait aussi avoir un impact sur la liberté de circulation des étudiants, scientifiques, professeurs.
Les multinationales, qui assument près de deux tiers des dépenses en recherche et développement et jouent de ce fait un rôle majeur dans le système d'innovation, en sont bien conscientes. Elles craignent de ne plus avoir accès à cette main-d'oeuvre hautement qualifiée de l'étranger dont elles ont besoin.
Les start-up à la place des PME?
Quant aux PME innovantes, le rapport constate que malgré leurs performances en comparaison internationale, leur part a diminué ces dernières années. On assiste à une concentration croissante. Pour les auteurs, il y a plusieurs raisons à cela: coûts élevés de production, longs délais d'amortissement et manque de fonds propres. Les PME dédaignent à recourir à des fonds extérieurs craignant une perte d'indépendance.
Johann Schneider-Ammann, s'inspirant de son expérience de chef d'entreprise, a indiqué qu'une véritable innovation n'existe que s'il y a un bailleur. Sans l'argent, l'innovation ne reste qu'une bonne idée', a-t-il dit.
Le rapport relève également que la combinaison PME, grandes entreprises et hautes écoles tend à être remplacée par un nouveau triangle reliant les hautes écoles, les start-up et le capital-risque. 'On peut s'interroger sur les résultats à attendre de ce nouveau modèle', écrivent les experts.
Sur ce point le Bernois a plaidé pour davantage de culture du risque. Les caisses de pensions ont la possibilité d'investir une petite partie de leur capital dans des start-up, mais il leur manque le soutien moral, a-t-il regretté.
Tous les 4 ans
Rédigé sous la responsabilité du Secrétariat d'Etat à la formation, à la recherche et à l'innovation (SEFRI), ce rapport sert de document de référence mais n'a pas pour objectif de proposer des mesures de pilotage du système suisse.
L'exercice sera répété tous les quatre ans, mais les comparaisons internationales seront elles actualisées tous les deux ans.
/ATS