Un registre d'intérêts des médecins ne verra pas le jour. Cédant au Conseil des Etats, le National a mis jeudi de l'eau dans son vin, lors de l'examen de la loi sur les produits thérapeutiques.
La gauche et l'UDC s'étaient unies la semaine passée à la Chambre du peuple pour réclamer que les fournisseurs de prestations annoncent en particulier les contrats qui les lient à des opérateurs économiques et les participations qu’ils détiennent au sein de ces derniers. Le Conseil fédéral devait régler les détails et veiller à ce que les informations contenues dans le registre soient accessibles au public.
La Chambre des cantons a estimé que la proposition allait trop loin et demandé au National de revoir sa copie. Si le registre passe à la trappe, les députés ont insisté par 122 voix contre 51 d'inscrire dans la loi une disposition sur les déclarations des liens d'intérêts. Au grand dam du PLR et du PBD.
Si un patient voit sur Internet que son médecin est lié à un fabricant de prothèse, il risque de mettre en doute sa bonne foi, a souligné Lorenz Hesse (PBD/BE). Il pourrait l'accuser de prescrire le dispositif non pas parce que c'est le meilleur, mais parce qu'il a des intérêts dans l'entreprise qui le fabrique.
Exceptions prévues
Rien n'y a fait. Les personnes qui prescrivent, remettent, utilisent ou achètent des produits thérapeutiques, ainsi que leurs employeurs, devront annoncer à leurs clients leurs participations chez des entreprises fabricant ces produits. Même topo si elles font partie d'organes de direction ou de surveillance au sein de ces entreprises ou si elles y exercent en tant qu'experts.
Elles devront également avertir leur clientèle si ces entreprises ont des participations dans leur cabinet, pharmacie ou organisation. Pour les produits présentant un risque minime, le Conseil fédéral pourra prévoir des exceptions.
Le principal défaut de cette nouvelle disposition est qu'il sera difficile de vérifier l'exactitude des dires des médecins, vu que leurs liens d'intérêts ne seront consignés nulle part, a critiqué Rebecca Ruiz (PS/VD). De fait, une contravention sera ardue, car le patient aura du mal à prouver que son médecin n'a pas indiqué ses liens. Les socialistes auraient voulu maintenir le registre. Ils ont dû se contenter de la version allégée.
Les députés ont par ailleurs accepté la modification des sénateurs sur la disposition interdisant l'acceptation d'avantages illicites en échange de la prescription ou l'utilisation de dispositifs médicaux et de médicaments soumis à ordonnance. Le gouvernement pourra désormais exclure certaines catégories de dispositifs médicaux de cette réglementation.
Renforcer les contrôles
Les deux Chambres ont déjà donné leur aval aux points centraux de la révision de la loi qui vise à l'adapter au droit européen et à renforcer les contrôles sur les dispositifs médicaux. Divers scandales impliquant par exemple des implants mammaires en silicone non étanches ou des prothèses de hanches défectueuses ont fait naître des doutes quant au système de contrôle dans l'UE.
L'Union européenne a donc décidé de moderniser et de durcir son cadre juridique. La Suisse va suivre. Le texte prévoit de renforcer les exigences pour tous les acteurs concernés et la surveillance du marché. Une identification claire de tous les produits devrait assurer une traçabilité complète. Et les données pertinentes pour le public devront être rendues accessibles sous une forme intelligible.
Parallèlement, patients et consommateurs continueront à profiter de tous les produits européens. Quant aux fabricants suisses, ils auront toujours accès au marché intérieur européen sans être désavantagés par rapport à leurs concurrents. La nouvelle réglementation entrera en vigueur en mai 2020, en même temps que dans l'UE.
Le texte devrait repasser lundi à la Chambre des Etats.
/ATS