Le Parlement devrait avoir le dernier mot concernant le Pacte de l'ONU sur les migrations. Après le Conseil des Etats, le National devrait soutenir une motion en ce sens. Faute de temps, il n'a toutefois pas réussi à trancher jeudi et a reporté sa décision à mardi.
Le ministre des affaires Ignazio Cassis n'a pas eu le temps de s'exprimer. Mais le pacte qui vise à définir des critères harmonisés pour une migration ordonnée a donné lieu à un débat animé à la Chambre du peuple. Le PLR et le PDC ont exprimé des réticences à l'égard du texte, mais seule l'UDC s'y est montrée fondamentalement hostile.
Le gouvernement assure que le texte n'est pas contraignant. Mais le texte répète à foison que les pays s'engagent à une série de choses parmi lesquelles la régularisation des sans-papiers, l'encouragement de l'intégration par des cours de langue déjà dans le pays d'origine ou encore une couverture médiatique positive sur la migration, a fustigé Thomas Aeschi (UDC/ZG).
Selon le président du PBD Martin Landolt, le pacte ne contient rien que le PBD ne pourrait soutenir, mais le gouvernement ne l'a pas assez bien expliqué. 'Seul le détour par le Parlement permettra de combler cette lacune.' C'est la seule voie possible pour obtenir le soutien démocratique suffisant, a abondé le PDC non sans émettre des doutes sur le fond. Il faut une approche pragmatique.
Réticences du PLR
Le PLR a aussi plaidé pour que le gouvernement présente au Parlement un projet d'acte détaillant les avantages et les inconvénients du document onusien. Ses orateurs ont exprimé de fortes réticences à pacte. Certains points sont problématiques, le gouvernement n'a pas fait l'analyse de risques nécessaire, a notamment relevé Doris Fiala (ZH).
La gauche s'est étonnée que le PLR tire dans le dos de son ministre des affaires étrangères Ignazio Cassis, avant de dénoncer elle-même le conseiller fédéral de zigzags remettant en cause la crédibilité de la politique étrangère suisse. 'La droite s'aligne sur les pires forces réactionnaires d'Europe', a fustigé Valérie Piller Carrard (PS/NE).
Pour le camp rose-vert, le pacte concrétise les principes de la déclaration universelle des droits de l'homme. Il est dans son intérêt de la Suisse de l'approuver car elle ne peut maîtriser seule le défi mondial de la migration, a expliqué pour les Verts Denis de la Reussille (Pop/NE).
Pas de rejet définitif
La gauche ne voit pas pourquoi il faudrait soumettre le pacte au Parlement. La majorité devrait la désavouer mardi en soutenant la motion de commission qui l'exige.
Le sort de la motion de Thomas Aeschi exigeant que le Conseil fédéral 'renonce une fois pour toutes à signer' le document et mette fin au rôle de premier plan joué par la Suisse dans ce processus est plus incertain. Les sénateurs ont refusé une motion identique la semaine dernière. Le groupe PLR a annoncé qu'il était divisé sur la question. Les autres partis veulent refuser la motion.
Le pacte vise à renforcer l'aide fournie sur place, lutter contre la traite des êtres humains et le trafic des migrants, sécuriser les frontières, veiller au respect des droits de l'homme, au rapatriement et à la réintégration ainsi qu’à l'intégration durable dans le pays d'accueil.
Le catalogue de mesures prévues diverge du droit suisse au moins sur un point, mais les Etats peuvent choisir les mesures utilisées pour atteindre les objectifs. Ces derniers comme les principes directeurs sont en parfaite conformité avec la politique migratoire suisse, a estimé le gouvernement en annonçant son soutien au texte.
Volte-face en novembre
Face à la fronde du Parlement menée par l'UDC, il a toutefois renoncé ensuite en novembre à se rendre à la conférence de Marrakech la semaine prochaine pour l'approbation formelle du pacte. Il avait dit vouloir attendre la fin des débats aux Chambres, mais répété sa position: comme il ne s'agit pas d'un traité international, le dernier mot devrait revenir au gouvernement, pas au Parlement.
Les Etats-Unis mis à part, presque tous les pays ont soutenu le pacte migratoire lors de son approbation par l'assemblée générale de l'ONU en juillet. Depuis une série d'Etats s'en sont désolidarisés comme la Hongrie, l'Autriche, l'Australie, la Tchéquie, Israël, la Pologne, la Bulgarie et l'Estonie. Le gouvernement italien a décidé mercredi de laisser le dernier mot au Parlement. Le texte a engendré une crise politique en Belgique et fait des vagues en France.
/ATS