Le loup ne pourra pas être chassé en Suisse toute l'année. Le Conseil des Etats a rejeté mercredi par 26 voix contre 17 une motion du PDC valaisan Beat Rieder. La majorité a préféré miser sur une solution plus équilibrée.
Dans la foulée, le Conseil des Etats a tacitement refusé de donner suite à une initiative cantonale valaisanne allant dans le même sens que la motion.
Craintes alpines
Les craintes exprimées par les cantons de montagne doivent être prises au sérieux, a plaidé en vain Werner Luginbühl (PBD/BE) au nom de la commission. Les mesures prises jusqu'ici pour protéger les troupeaux et pour procéder à des abattages isolés ne suffisent pas.
Trop d'embûches sont prévues avant que l'autorisation de tirer soit accordée. Il faudrait désormais freiner l’augmentation du nombre de loups moyennant des interventions efficaces au niveau des populations, à l’instar des expériences faites dans divers pays européens.
Plusieurs pays ont déjà émis des réserves à la Convention de Berne, qui classe le loup dans la catégorie des espèces de faune strictement protégées, a souligné Beat Rieder. La France s'est lancée dans de grandes battues.
Carnages
Est-il nécessaire de tellement préserver ce prédateur que l'on doive tirer au canon sur des personnes, a lancé le Valaisan en évoquant les procédures judiciaires ouvertes contre ceux qui ont abattu des canidés. Et d'ajouter que les loups se sont livrés récemment à des carnages dans le Lötschental en s'attaquant à des cerfs.
Les meutes se multiplient. Ce n'est pas seulement un problème valaisan, mais de toute l'Europe. La compétence de réguler les effectifs devrait être déléguée complètement aux cantons. Une chasse ouverte toute l'année ne signifierait pas que le loup serait éradiqué, a ajouté Werner Hösli (UDC/GL), parlant d'hystérie de la part des défenseurs d'Ysengrin.
Déraisonnable
Soutenue par la ministre de l'environnement Doris Leuthard qui s'est défendue de n'avoir rien fait depuis 2003, la majorité a appelé à garder le sens de la mesure. Les animaux mangent des animaux, c'est dans la nature, a rappelé la conseillère fédérale.
Le Parlement est appelé à se prononcer pour la douzième fois sur le loup, a critiqué Robert Cramer (Verts/GE), dénonçant une agitation excessive et déraisonnable. Jusqu'à 300 moutons sont mangés par des loups chaque année alors que des milliers meurent d'autres raisons (accidents, manque de soins, maladie) dans les pâturages, a-t-il souligné.
Une chasse ouverte toute l'année serait non seulement incompatible avec la Convention de Berne mais aussi avec la Constitution fédérale qui protège les espèces menacées d'extinction, a ajouté Konrad Graber (PDC/LU).
Les cantons se sont opposés à la motion, car ils ne veulent entre autres pas des nouvelles responsabilités qu'elle induirait pour eux, a poursuivi Didier Berberat (PS/NE).
Compromis
La majorité préfère miser sur une solution équilibrée, tenant compte à la fois des revendications des régions de montagne que des impératifs en matière de protection du loup. Une révision de la loi sur la chasse est déjà en cours d'élaboration pour faciliter les tirs de loups.
Il devrait être possible d'abattre le canidé dans une région où rôdent des meutes causant des dommages aux troupeaux et compromettant la bonne répartition de la faune sauvage, la sécurité publique ou l'exploitation touristique.
Tirs facilités
Depuis juillet dernier, il est déjà plus facile d'abattre Ysengrin en Suisse. Un canton peut, avec l'accord de l'Office fédéral de l'environnement, réguler les effectifs de loup si au moins quinze animaux de rente ont été tués en quatre mois sur le territoire d'une meute de loups comprenant des jeunes.
Il est aussi possible d'abattre les jeunes loups qui s'approchent trop des zones habitées et se montrent agressifs ou peu farouches. Le quota de tir sur le territoire d'une meute ne doit toutefois pas dépasser la moitié du nombre de louveteaux nés dans l'année. Et il est interdit d'abattre de jeunes loups l'année de leur naissance ou l'année suivante. Les géniteurs doivent quant à eux être épargnés.
Le canidé peut en outre être tiré s'il a tué au moins 35 moutons ou chèvres en l'espace de quatre mois consécutifs durant la première année après son apparition dans une région. Idem s'il a croqué 25 animaux en un mois.
La situation a évolué depuis le retour du prédateur en Suisse. Le nombre d'animaux augmente pour atteindre la trentaine et des meutes se forment. La première a été observée en 2012 à Calanda (GR).
/ATS