Les succès des Verts aux élections européennes donnent des ailes aux écologistes suisses, qui annoncent vouloir 'gagner' lors des fédérales d'octobre. Les partis suisses s'interrogent aussi sur l'impact du vote des Vingt-huit sur la relation entre Berne et Bruxelles.
La conseillère nationale Adèle Thorens (Verts/VD) a salué lundi les succès des partis écologistes, en France ou en Allemagne. Elle y voit un 'antidote' à la montée des populismes en Europe mais aussi aux Etats-Unis, ainsi qu'un signal de plus en vue des élections fédérales de cet automne.
Les résultats confirment 'la vague verte observée ces derniers mois et années, y compris dans les cantons et communes suisses', a-t-elle déclaré à Keystone-ATS. Une poussée qui date d'avant les manifestations pour le climat et de l'avènement de la figure de la jeune militante suédoise Greta Thunberg, selon elle.
'Les Verts gagneront' lors des élections fédérales de cet automne, a promis le chef du groupe au Parlement et conseiller national Balthasar Glättli (Verts/ZH) lors d'une conférence de presse à Berne. Il n'a pas voulu donner d'objectif chiffré pour le Conseil national. Mais le parti vise au moins à récupérer les pertes subies lors des derniers scrutins.
'Plus les Verts gagneront des sièges, plus les autres partis seront ouverts aux revendications écologistes', a souligné le Zurichois, qui voit aussi son parti dans un rôle de rempart face aux forces populistes en Europe. Celles-ci ont certes progressé, mais leur montée est moins forte que prévu, 'notamment grâce aux Verts'.
La question européenne
Pour le conseiller aux Etats Filippo Lombardi (PDC/TI), les craintes d'une montée des mouvements populistes ont occulté le débat de fond sur les réformes dont l'Union européenne a besoin, par exemple sur la question de l'euro ou sur les dettes de certains pays.
Interrogé sur les enseignements à tirer pour les élections fédérales, M. Lombardi note que la Suisse ne pourra pas faire l'impasse sur une discussion sérieuse sur ses relations avec l'Union européenne. Après le Brexit, celle-ci s'est ressoudée et ceux qui avaient prédit que Bruxelles lâcherait du lest à l'égard des pays tiers se sont trompés. 'Nous ne pourrons pas glisser le dossier européen dans un tiroir'.
Le conseiller national Yves Nidegger (UDC/GE) pense lui que la nouvelle Commission sera plus tempérée dans ses relations avec les pays tiers. Avec la fin de l'hégémonie des conservateurs pro-européens et des sociaux-démocrates, il y aura de nouveaux rapports de forces au sein du Parlement européen.
Et l'exemple anglais montre que 'l'inflexibilité n'est pas une bonne méthode', a ajouté M. Nidegger, en référence au triomphe du Parti du Brexit de Nigel Farage au Royaume Uni.
Protection des salaires
Président du Parti socialiste, Christian Levrat ne se risque à aucun pronostic sur l'orientation de la nouvelle Commission. 'Tout est encore ouvert et il n'est même pas sûr que les pays membres se décideront pour l'un des candidats évoqués ces jours', relève-t-il.
Dans la perspective d'un accord-cadre avec l'UE, le conseiller aux Etats fribourgeois espère que le nouveau Parlement sera plus ouvert sur la question de la protection des salaires. La Suisse devra elle davantage se mêler de politique européenne. Les partis politiques suisses devront en particulier mieux expliquer la position de la Suisse aux formations présentes au Parlement européen.
Le Nouveau mouvement européen Suisse (Nomes) appelle le Conseil fédéral à signer l'accord institutionnel avec l'UE et à rouvrir 'de manière constructive et sans tabou' le débat sur une adhésion de la Suisse.
'Même si l'accord institutionnel voit le jour, il ne peut que représenter une étape sur le chemin de l'intégration. De plus, en cas d'échec de l'accord, la question de l'adhésion redeviendra d'actualité. C'est donc maintenant qu'il convient de s'interroger sur cette question', déclare le coprésident du Nomes François Cherix, cité dans un communiqué.
Chute des partis traditionnels
Le conseiller national Laurent Wehrli (PLR/VD) souligne que le nouveau Parlement européen, plus fragmenté, nécessitera plus d'énergie pour parvenir à un consensus. Il s'est dit en outre 'impressionné' par la chute des partis traditionnels, en France notamment, au profit de mouvements 'disrupteurs'.
Laurent Wehrli prévoit lui aussi une montée des Verts lors des élections fédérales de cet automne. Mais il rappelle que les écologistes avaient perdu du terrain lors des derniers scrutins et que les Verts, en Allemagne, n'ont pas récupéré la force qu'ils avaient gagnée après la catastrophe de Fukushima en 2011.
Pour Yves Nidegger, la progression des Verts sera plus forte en Suisse alémanique qu'en Suisse romande, les Tessinois restant 'étanches' sur cette question.
S'agissant de la montée du populisme, la Suisse se situe dans une autre phase, selon Laurent Wehrli. Après le oui à l'initiative de l'UDC sur 'l'immigration de masse' début 2014, l'immigration n'est plus un sujet majeur en Suisse. Et en Suisse, les partis traditionnels résistent bien.
/ATS