Les cas graves de corruption privée dans les organisations sportives ou les entreprises seront dorénavant poursuivis d'office. Après le scandale qui a frappé la FIFA en mai dernier, le Parlement a décidé de durcir le code pénal.
Le Conseil des Etats a mis jeudi tacitement sous toit ces nouvelles dispositions. Alors qu'il n'admettait l'ouverture de procédures d'office que si l'intérêt public était menacé, il a opté pour le compromis adopté par le Conseil national mardi: seules les infractions légères seront poursuivies sur plainte.
Le Conseil fédéral défendait une ligne plus stricte, soit la poursuite d'office indépendamment de la gravité des cas, comme pour les agents publics. Selon la ministre de la justice Simonetta Sommaruga, l'alternative retenue par le Parlement posera des problèmes de mise en œuvre.
Qui décidera ce qui est un cas grave? Quand faudra-t-il agir? Si ce n'est pas le législateur qui définit la gravité d'un acte, il appartiendra au procureur de le faire. Ce flou risque d'introduire une insécurité juridique et de compliquer la poursuite de la corruption.
Les Chambres fédérales ne l'ont pas entendu de cette oreille. Elles estiment qu'il serait disproportionné de poursuivre les cas bénins d'office. Alors même que ces actes sont déjà exclus des poursuites en vertu de l'article 52 du code pénal, a argué en vain la conseillère fédérale.
Distorsions de concurrence
La majorité bourgeoise a donc décidé de se limiter aux cas graves. Ce d'autant plus que la Suisse est l'un des pays les moins touchés par la corruption.
Une réalité à prendre toutefois avec des pincettes, vu qu'aucune condamnation n'a été enregistrée depuis la dernière réforme de la législation pénale en matière de corruption en 2006. Et le scandale qui touche la FIFA a clairement révélé des faiblesses concernant le phénomène privé.
Or la corruption privée ne touche pas uniquement des intérêts financiers privés, mais provoque des distorsions de concurrence, portant atteinte à l'image et à la réputation du pays lorsqu'elle touche de grandes organisations internationales.
De grands intérêts, y compris d’importants subventionnements publics sont par exemple en jeu lors de l'attribution d'événements sportifs de renommée planétaire. Et la Suisse compte près de 50 instances sportives internationales.
Trois ans de prison
Raison pour laquelle la corruption ne sera dorénavant plus réglée dans le droit de la concurrence, mais dans le code pénal. La peine est fixée à 3 ans de prison maximum.
Les sanctions pourront s'appliquer à la fois à des entreprises ou à des associations de droit privé, comme les associations sportives. Les avantages conformes aux usages commerciaux seront aussi punissables.
Le projet prévoit par ailleurs d'étendre la norme sur la corruption d'agents publics. De tels comportements deviendraient punissables dans tous les cas, y compris quand ce n'est pas l'agent lui-même qui touche les pots-de-vin, mais un tiers comme un club sportif.
La révision de la loi répond à des recommandations faites par le Groupe d'Etats contre la corruption (GRECO) à la Suisse fin 2011. Mais elle intervient surtout au moment où la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) est éclaboussée par des accusations de corruption.
Début juin, son président Sepp Blatter a annoncé qu'il jetait l'éponge. L'annonce de sa démission fait suite aux arrestations spectaculaires de sept dirigeants de la Fédération internationale fin mai au siège de l’organisation à Zurich.
/ATS