Des arrivées de gaz non obturées sont à l'origine de l'explosion qui a coûté la vie à une mère et sa fillette en 2011 à Yverdon-les-Bains. La question des responsabilités - entre employés de la ville ou propriétaire de l'immeuble - est au coeur du procès ouvert lundi.
Trois collaborateurs ou anciens collaborateurs des services industriels de la commune comparaissent cette semaine devant le Tribunal du Nord vaudois, qui siège pour l'occasion dans la salle cantonale à Renens. Mais ils sont seuls sur le banc des accusés, une situation incompréhensible aux yeux de leurs avocats.
D'emblée, ces derniers ont demandé la suspension du procès, pour investiguer les responsabilités du propriétaire de l'immeuble - une caisse de pension - et de la gérance. La Cour a rejeté cette demande, estimant que les faits essentiels avaient été suffisamment instruits.
Travaux mal réalisés
Pour comprendre l'enjeu, il convient de revenir sur l'histoire du bâtiment. Ce locatif n'était plus alimenté en gaz depuis 1998, mais il avait subi différents travaux alors que les canalisations de gaz - qui débouchaient dans les cuisines - étaient toujours en place.
Première erreur: en raison de ces travaux, les conduites de gaz n'étaient plus bouchonnées dans sept appartements, dont le numéro 41 où s'est produite l'explosion. Deuxième erreur: le matin du 25 octobre 2011, deux monteurs des services industriels sont venus contrôler la vanne de branchement au pied de l'immeuble et sont repartis en la laissant ouverte ou mal refermée.
La machine à laver provoque l'explosion
Le gaz s'est alors répandu dans l'immeuble. Quelques heures plus tard, vers 13h30, une explosion a soufflé tout l'appartement, lorsque la jeune mère a lancé sa machine à laver. Une étincelle de l'appareil semble avoir suffi à provoquer le drame. La locataire de 31 ans et sa fillette de cinq ans sont mortes sur le coup.
Pour les avocats de la défense, les responsabilités sont à chercher du côté du propriétaire, en raison des 'défauts à son installation intérieure de gaz, qui était gravement non conforme aux prescriptions', a fait valoir Me Philippe Graf. Peut-être aussi du côté de la gérance, car une locataire avait téléphoné deux fois ce matin-là pour signaler une odeur de gaz.
Prescription
Le procureur Stefan Johner ne conteste pas 'qu'il y a eu des fautes du côté des propriétaires, mais cela remonte à tellement longtemps que c'est prescrit. Le tribunal ne peut pas revenir là-dessus', a-t-il dit. Il estime que l'on ne peut rien reprocher pénalement à l'employée de la gérance qui a reçu un coup de fil d'une locataire disant que son frigo sentait le gaz.
Le Ministère public estime qu'il était en revanche de la responsabilité des trois accusés de veiller à ce que les monteurs ayant procédé au contrôle des vannes soient correctement formés; et de faire en sorte que les propriétaires d'immeubles soient informés de leur devoir de faire contrôler et entretenir leurs branchements d'immeuble.
Deux municipaux à l'audience
Deux municipaux de la ville d'Yverdon-les-Bains, Gloria Capt en charge des services industriels au moment du drame et Pierre Dessemontet l'actuel directeur, ont assisté lundi à l'audience. Ils sont venus soutenir leurs collaborateurs mis en cause, ont-ils expliqué.
Après l'accident, la municipalité a fait procéder au contrôle et à l'inventaire des immeubles reliés au gaz sur son territoire. Elle a aussi élaboré un plan de sécurité dans ce domaine. 'Nous avons tout fait pour que cela n'arrive plus. Mais on sait qu'il n'y a pas de risque zéro', a dit Mme Capt.
Le procès est agendé toute la semaine. Verdict attendu le 9 juin.
/ATS