L'Afghanistan a préparé à Genève avec des dizaines de pays la voie vers des négociations de paix et d'un accord durable, malgré de nouvelles attaques. Mercredi, la Suisse s'est dite prête à accueillir des pourparlers directs entre gouvernement et talibans.
Dans leur communiqué final, les ministres de nombreux Etats réunis autour du président afghan Ashraf Ghani affirment clairement que toute négociation doit avoir lieu 'entre Afghans'. Ils soulignent aussi l'importance de la participation des femmes et de toute la société afghane.
Du secrétaire général de l'ONU au conseiller fédéral Ignazio Cassis en passant par les autorités afghanes, tout le monde estime que 'le temps du dialogue est venu'. La pression sur les insurgés augmente, de même que celle sur les Etats qui les soutiennent, a affirmé devant la presse le conseiller afghan à la sécurité nationale Hamdullah Mohib. 'Le moment est venu pour les talibans de montrer qu'ils sont sérieux' et s'ils souhaitent être 'constructifs' pour la société afghane.
Un défi lancé alors que les talibans ont tué au moins dix personnes mercredi dans une double attaque contre une compagnie britannique de sécurité. Et que les violences ont fait un record de victimes civiles durant la première partie de l'année dans un pays également affecté par une importante sécheresse. Aucun insurgé n'était présent à la réunion de Genève.
Talibans associés
Lors de la conférence, après avoir lancé en février dernier une offre de pourparlers sans conditions aux talibans, M. Ghani a annoncé une 'feuille de route vers la paix' après sept mois de consultations avec la population. Les talibans seront associés aux institutions afghanes mais les autres groupes terroristes qui chercheraient à interférer ne seront pas tolérés.
M. Ghani a confirmé que son chef de cabinet Abdul Salam Rahimi mènerait la délégation gouvernementale à d'éventuels pourparlers. Des négociations que M. Cassis s'est dit prêt à accueillir. 'Nous penserons à quelle sera la meilleure offre', a dit M. Mohib qui a souligné avoir apprécié le soutien international.
De son côté, le chef exécutif du gouvernement afghan Abdullah Abdullah a détaillé le format que Kaboul souhaite pour des pourparlers. Outre les discussions directes avec les talibans, les autorités veulent consulter leurs alliés américains, leurs voisins iranien et pakistanais ainsi que l'OTAN. L'émissaire américain, accusé par certains de délégitimer le gouvernement, a d'ailleurs récemment rencontré les talibans.
Promesses européennes
La Suisse semble bien positionnée pour accueillir des négociations parce que les Afghans la considèrent comme un pays similaire au leur. Autre avantage: Berne peut oeuvrer comme acteur non partisan au milieu de plusieurs pays, comme la Russie, qui reviennent sur la scène.
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a estimé que le mécanisme lancé par Moscou, où les deux parties étaient autour de la même table avec des pays de la région, pourrait accompagner des discussions directes.
Côté européen, la cheffe de la diplomatie européenne Federica Mogherini a promis de soutenir davantage encore les Afghans. Bruxelles était arrivée mardi au premier jour de la conférence avec des accords de développement pour 474 millions d'euros (environ 530 millions de francs).
Cadre mutuel de Genève
Autre avancée à Genève, la conférence a adopté un Cadre de responsabilité mutuelle pour l'Afghanistan et ses partenaires internationaux. Celui-ci fixe notamment comme priorités de réformes pour les deux prochaines années la lutte contre la corruption, le développement et l'établissement d'institutions pour attirer les investissements.
Il faut que l'Afghanistan établisse dans les cinq prochaines années comment il bascule d'une 'économie liée aux donateurs' à un pays qui a accès aux marchés et bénéficie d'un important secteur privé, a dit devant la presse le ministre des finances Mohammed Qayoumi. Selon lui, tous les volets du Cadre doivent être liés ensemble. 'Aucun pays n'est passé de la pauvreté à la prospérité' avec l'assistance de donateurs.
La communauté internationale avait promis 15 milliards de dollars il y a deux ans à Bruxelles. La prochaine conférence de donateurs doit avoir lieu dans deux ans.
En marge de la conférence mercredi, des centaines de Hazaras ont demandé sur la Place des Nations la fin du 'génocide'et des discriminations contre leur communauté. Ils ont ciblé directement M. Ghani.
/ATS