Confrontés à la menace d'un rebond de l'épidémie, une dizaine de départements français supplémentaires vont passer sous couvre-feu dès 18h00. La décision suscite la grogne d'élus locaux qui doutent de l'efficacité de la mesure.
En déplacement à Tarbes (Hautes-Pyrénées), le Premier ministre Jean Castex a défendu des 'mesures difficiles mais nécessaires' face à une 'épidémie (qui) ne faiblit pas, ou qui se renforce dans certaines zones du territoire'.
La nouvelle mesure va s'appliquer à partir de dimanche dans huit départements: le Cher, l'Allier, la Côte-d'Or, le Haut-Rhin et le Bas-Rhin, ainsi que le Vaucluse, les Alpes-de-Haute-Provence et les Bouches-du-Rhône, ont annoncé samedi les préfectures concernées.
A Marseille, la mairie, à gauche, et la région, à droite, avaient dénoncé d'une même voix la mesure, qui, selon eux, n'a pas prouvé son efficacité. Mais le préfet des Bouches-du-Rhône a justifié sa décision, après la découverte d'un cluster familial 'élargi' (21 cas) présentant le nouveau variant britannique au coronavirus, réputé plus contagieux.
Le Var et la Drôme, qui ne faisaient pourtant pas partie des départements envisagés, ont annoncé à leur tour la mise sous cloche à 18h00, à compter de mardi seulement. En cause: une 'aggravation brutale de la circulation du virus', a-t-on expliqué à Matignon. La préfecture de la Drôme souligne notamment que le taux de positivité, qui mesure le pourcentage de personnes testées positives au Covid sur l'ensemble des personnes testées, est le plus élevé de la région Auvergne-Rhône-Alpes (9,4%).
Tous ces départements rejoindront les quinze autres, principalement de l'est de la France, qui sont déjà soumis à un couvre-feu avancé depuis une semaine, tandis que le reste du territoire le maintient à 20h00. Malgré des indicateurs préoccupants, les préfectures de Haute-Savoie et de l'Yonne n'ont pas avancé leur couvre-feu.
Dépistage massif à Bagneux
Pour le gouvernement, la mise en place de cette mesure, appliquée pour la première fois fin octobre, a permis de ralentir les contaminations. Elle n'a toutefois pas empêché un deuxième confinement, soulignent ses détracteurs.
Le président des maires du Vaucluse, Jean-François Lovisolo, se dit 'très réservé'. 'A 18h00, la population à risque est déjà chez elle et on va mettre en difficulté les commerçants, les restaurants qui font de la vente à emporter, les stations-service, les boulangeries', a-t-il dit à l'AFP.
Le chef du service des maladies infectieuses à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, Eric Caumes, ne cache pas non plus son scepticisme: 'Je ne suis pas sûr que ce soit très efficace mais on verra bien', a-t-il déclaré samedi sur franceinfo.
En attendant, une opération de dépistage massif s'est déroulée samedi à Bagneux, en banlieue parisienne, où le variant issu du Royaume-Uni, a été détecté vendredi. Quelques centaines de volontaires sont venus se faire tester, à l'instar de Maria, 64 ans, 'encore plus inquiète' avec l'apparition de cette mutation du virus.
Pour l'instant, en prenant en compte le cluster, tout juste découvert dans les Bouches-du-Rhône, une quarantaine de cas de contamination par ce variant sont avérés dans toute la France (ainsi que trois autres par un variant différent initialement repéré en Afrique du Sud).
Troisième confinement ?
Depuis mardi, le nombre de cas positifs tourne autour de 20'000 par jour, avec 20'177 nouvelles contaminations enregistrées samedi. Le taux de positivité continue de progresser (6,3%), et la tension hospitalière reste élevée.
Des chiffres d'autant plus inquiétants que musées, cinémas, théâtres, salles de sport (sauf pour les mineurs), cafés et restaurants sont fermés depuis fin octobre, sans perspective de réouverture prochaine. Les deux prochaines semaines s'annoncent donc cruciales, avec les probables retombées des fêtes de fin d'année.
Sur le front des vaccins, le ministre de la Santé Olivier Véran a affirmé que le pays passerait 'probablement le cap symbolique des 100'000 Français vaccinés dans le week-end', et a promis que 'la semaine prochaine, le rythme augmentera encore'. Plus de 80'000 soignants et personnes vulnérables en Ehpad ont été vaccinés depuis lundi.
Sans prononcer le mot de 'reconfinement', et tout en prévenant que les écoles ne devaient fermer qu'en cas de situation 'gravissime', le Premier ministre Jean Castex n'a pas exclu jeudi d'aller encore plus loin et de prendre des 'mesures nationales supplémentaires'.
Comme un troisième confinement ? 'Si la courbe continue de monter malheureusement, il y aura pas d'autre solution', a averti le Pr Caumes. Depuis le début de l'épidémie, la maladie a fait plus de 67'500 morts en France.
/ATS