Les études sur la pollution atmosphérique qui ne prennent pas en compte le bruit des transports tendent à surestimer ses effets sur la santé cardio-vasculaire. C’est ce qu’indique une étude de l’Institut tropical et de santé publique suisse (Swiss TPH).
En règle générale, lorsque la pollution atmosphérique est élevée, le niveau de bruit des transports l’est aussi. Or, comme l'ont montré des études antérieures, le bruit des circulations aérienne, ferroviaire et routière augmente également le risque de maladies cardiovasculaires et de diabète, a indiqué jeudi le Swiss TPH dans un communiqué.
Les études analysant l’effet de la pollution atmosphérique sans prendre suffisamment en compte les répercussions du bruit sur la santé risquent donc de surestimer l’effet à long terme de la pollution atmosphérique, selon cette recherche publiée dans la revue European Heart Journal.
Entre 1,9% et 5,2%
L’étude a examiné les effets combinés de la pollution atmosphérique et du bruit sur la mortalité due aux crises cardiaques, en tenant compte de tous les décès (19'261) survenus en Suisse entre 2000 et 2008. Les analyses incluant uniquement les particules fines suggèrent que le risque de crise cardiaque s’accroît de 5,2% pour chaque augmentation de 10 μg/m3 de la concentration moyenne au domicile.
Or les études tenant également compte du bruit des transports révèlent qu’en réalité, l’augmentation du risque de crise cardiaque imputable aux particules fines est nettement moins élevée: 1,9% pour chaque augmentation de 10 μg/m3.
'Notre étude montre que le bruit des transports accroît le risque de crise cardiaque de 2% à 3,4% à chaque fois que le niveau moyen de pression acoustique à domicile augmente 10 décibels', indique Martin Röösli, chercheur au Swiss TPH et auteur principal de l’étude, cité dans le communiqué.
'Il a été frappant de constater que les effets du bruit étaient indépendants de l’exposition à la pollution atmosphérique', ajoute le spécialiste.
Effets cumulatifs
L’étude a également révélé que les personnes exposées à la fois à la pollution atmosphérique et au bruit étaient les plus sujettes au risque de crise cardiaque. Les effets de la pollution atmosphérique et du bruit sont donc cumulatifs.
'Les débats publics se concentrent souvent sur les effets négatifs qu’ont sur la santé soit la pollution atmosphérique, soit le bruit; mais ils n’examinent pas leur impact combiné', note le Pr Röösli. 'Notre étude suggère que les deux types d’expositions doivent être examinés en même temps'.
Cette découverte a une incidence à la fois sur la politique et sur la recherche. Afin d’éviter que les effets négatifs de la pollution atmosphérique sur le système cardiovasculaire ne soient surestimés, les auteurs recommandent d’inclure l’exposition au bruit des transports dans toute étude future.
Données couvrant toute la Suisse
Pour cette recherche, la pollution atmosphérique par particules fines a été modélisée à partir de données de satellites calibrées au moyen de mesures de pollution atmosphérique provenant de 99 stations dans toute la Suisse.
Les dioxydes d’azote ont également été modélisés à partir de 9469 mesures d’échantillonnages passifs bihebdomadaires, collectées entre 2000 et 2008 sur 1834 sites en Suisse. Le bruit des transports était basé sur des modèles de propagation développés notamment par l'Empa. Ces différentes données ont été appliquées aux 4,4 millions de citoyens suisses âgés de 30 ans et plus.
L'étude a été financée par le Fonds national suisse (FNS) et l’Office fédéral de l’environnement. Elle a été menée dans le cadre de SiRENE (effets à court et à long terme de l’exposition au bruit routier), un projet de recherche interdisciplinaire qui combine les expériences menées en laboratoire du sommeil avec le développement épidémiologique, les données issues de sondages et les calculs et modélisations acoustiques.
/ATS