La Suisse n'est pas inquiète pour son agriculture dans les négociations lors d'une ministérielle de l'OMC qui débute dimanche à Buenos Aires sans grande attente. En revanche, elle veut des 163 autres membres de la modération pour préserver l'avenir de l'institution.
Le fonctionnement de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ne s'arrêtera pas 'à Buenos Aires', a affirmé à l'ats l'ambassadeur de la Suisse auprès de de cette entité, Didier Chambovey. Un message que la présidence argentine de la réunion et que le directeur général de l'institution Roberto Azevedo ont répété ces derniers mois.
Berne, attachée à préserver les acquis de l'organisation, veut un programme de travail pour les prochaines années. 'Nous sommes dans une période assez critique. L'OMC n'est pas en danger, mais les membres doivent faire preuve de pragmatisme pour trouver des solutions adéquates et apaiser les tensions', dit aussi l'ambassadeur.
Au centre des divergences reste la poursuite ou non de l'approche actuelle sur les questions de Doha. Dans un contexte de blocage, alimenté par les Etats-Unis du président Donald Trump, sur la juridiction d'appel d'arbitrage au sein de l'organisation, qui pourrait remettre en cause le système de plaintes vanté par l'OMC.
Emmenée par Schneider-Ammann
Sur le fond, après deux ministérielles qui avaient abouti à des résultats, une avancée importante est peu probable, selon des sources concordantes. Les divisions sont nombreuses et l'administration Trump n'a pas établi sa politique commerciale multilatérale. Malgré des déclarations plutôt hostiles au libre-échange du président américain, 'il n'y a rien qui laisse penser que les Etats-Unis claqueront la porte' de l'OMC, dit M. Chambovey.
Il y a deux ans, la Suisse avait accepté de renoncer sous 5 ans à ses subventions aux exportations agricoles. Dans un contexte tendu entre le conseiller fédéral Johann Schneider-Ammann et les paysans après l'annonce d'une politique d'ouverture du marché des produits agricoles dès 2022, son soutien interne à l'agriculture ne devrait cette fois-ci pas être menacé.
Alors même que la coalition d'ONG Alliance Sud lui demande un effort pour éviter de défavoriser les agriculteurs de pays en développement. 'Je ne pense pas qu'il y ait des inquiétudes à avoir. Les divergences sont trop profondes', relève M. Chambovey.
Les commissions parlementaires avaient renvoyé au Conseil fédéral le projet de mandat de négociation pour obtenir des garanties de fermeté de la délégation emmenée par M. Schneider-Ammann. 'Nous sommes d'accord' avec celui qui a été retravaillé, affirme une porte-parole de l'Union suisse des paysans (USP).
Commerce électronique
Chine et Inde souhaitent l'élimination de tous les soutiens internes qui constituent une distorsion au commerce. De leur côté, l'Union européenne (UE) et le Brésil proposent de les limiter en proportion de la valeur de la production agricole nationale. Des revendications inacceptables pour la Suisse, qui peut s'appuyer sur des alliés.
Autre question, Berne veut une clarification sur le commerce électronique. A défaut d'une exclusion permanente de taxes sur ces transactions, contestée par Alliance Sud, elle devrait obtenir gain de cause sur la prolongation d'un moratoire de deux ans.
La Suisse aimerait que l'OMC se dote d'un mandat pour des négociations à terme sur le fond avec des produits comme les imprimantes 3D ou des services comme les interventions chirurgicales à distance. 'Il serait bon qu'il y ait une réglementation internationale', selon M. Chambovey.
Dans un premier temps, Berne veut un accent sur la protection des consommateurs et les spams, mais aussi sur les contrats et les signatures électroniques. Et il faut évaluer si les accords existants à l'OMC peuvent s'appliquer ou non au commerce électronique, estime l'ambassadeur.
A Buenos Aires, la délégation suisse va aussi pousser pour une avancée sur la facilitation des investissements et sur les PME.
Arrangement possible sur la pêche
Les deux thématiques les plus prometteuses ne sont pas sensibles pour Berne. Les détentions de stocks publics agricoles doivent être réglées lors de cette 11e ministérielle, selon le calendrier prévu.
Un arrangement est aussi possible sur l'élimination des subventions à la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN). Il 'serait bon pour la protection des ressources naturelles, pour le commerce et pour l'OMC', ajoute l'ambassadeur.
/ATS