L'annonce par la première ministre britannique, Theresa May, de l'ouverture des discussions sur le Brexit d'ici fin mars a fait plonger la monnaie britannique. Elle a ravivé les craintes d'un divorce douloureux sur le plan économique.
Véritable baromètre de l'humeur du marché, la livre décrochait fortement face au dollar et à l'euro. Elle a atteint 87,46 pence pour un euro, son niveau le plus faible depuis début août 2013, tout en tombant à 1,2846 dollar pour une livre, son niveau le plus bas depuis début juillet dernier. Elle avait alors atteint un plus bas depuis juin 1985.
La décision de Theresa May d'activer 'avant fin mars' l'article 50 du traité de Lisbonne, qui déclenchera les discussions de sortie de l'Union européenne (UE), a ravivé les incertitudes liées à la complexité des négociations à venir et à leur issue.
Les propos de la première ministre britannique, qui a notamment signifié que son pays comptait bien répondre à la demande des Britanniques de contrôler l'afflux de migrants européens, suggèrent que 'le Royaume-Uni pourrait être tenté par ce que l'on appelle un Brexit dur'. Il s'agirait alors d'une séparation sans compromis.
Montagnes russes
Ce scénario priverait les milieux d'affaires de toute flexibilité et visibilité, soulignait Ipek Ozkardeskaya, analyste chez London Capital Group. 'Il est généralement admis que plus Mme May insiste sur le contrôle de l'immigration, plus l'UE est encline à fermer l'accès au marché unique', renchérissaient les économistes chez Rabobank.
Et pour Holger Schmieding, chef économiste au sein de la banque allemande Berenberg, un 'Brexit dur', qui passerait par une forte restriction de l'immigration économique, 'risque d'être le plus dommageable pour l'économie britannique sur le long terme'.
Le leader du parti libéral-démocrate, Tim Farron, a de son côté estimé que l'annonce de Theresa May était un 'désastre'. Il redoute la perte de l'accès au marché unique pour le Royaume-Uni, qui est vital en particulier pour le secteur financier.
Interrogé lundi matin par la BBC en marge du congrès du parti conservateur à Birmingham au centre de l'Angleterre, le ministre britannique des finances, Philip Hammond, a admis que l'économie du pays allait affronter des 'turbulences' et des 'montagnes russes', lors des négociations à venir.
'Il y aura une période de deux ans, voire peut-être même davantage, où les entreprises seront confrontées à l'incertitude sur la nature finale de notre relation avec l'UE', a-t-il souligné.
Pour l'heure cependant, malgré les scénarios catastrophes dessinés par les partisans du maintien dans l'UE avant le référendum du 23 juin, l'économie britannique semble faire preuve d'une grande résistance.
'Il y a encore de l'incertitude. Mais le ciel n'est pas tombé sur nos têtes, contrairement à certaines prédictions', a d'ailleurs observé dans son discours de Birmingham, Theresa May, citant un certain nombre d'indicateurs encourageants.
La consommation des ménages n'a pas faibli, le chômage n'a pas progressé, au contraire. Et la construction se porte plutôt bien. Philip Hammond a annoncé lundi un plan de 5 milliards de livres pour ce secteur, lors de son discours devant les militants conservateurs à Birmingham tandis qu'il a décidé d'abandonner l'objectif de son prédécesseur d'équilibrer les comptes du pays d'ici 2019/2020.
Bourse dans le vert
Dernier indicateur en date publié lundi matin par Markit, l'indice PMI mesurant l'activité dans le secteur manufacturier a atteint en septembre un plus haut depuis mi-2014. Il a tiré profit de la baisse de la livre.
Car le repli de la monnaie britannique ne représente pas qu'une mauvaise nouvelle, en renchérissant le prix des produits importés pour les consommateurs. Outre qu'il gonfle le pouvoir d'achat des touristes munis d'autres devises, il donne une bouffée d'air frais aux nombreuses multinationales britanniques exportatrices qui réalisent une grande part de leur activité à l'étranger.
C'est la raison pour laquelle la Bourse de Londres ne tremblait pas lundi matin. Elle s'affichait même en nette hausse de plus de 1% à la mi-journée.
/ATS