L'imposition de la valeur locative à la charge des propriétaires est contestée depuis des lustres. Une commission parlementaire veut la supprimer tout en revoyant la déduction des intérêts hypothécaires et des frais d'entretien. La gauche rejette en bloc le projet.
Globalement, le projet de la commission de l'économie du Conseil des Etats, soumis en consultation jusqu'à vendredi, prévoit l'abolition de la valeur locative. En compensation, les frais d'entretien, ceux pour l'assainissement énergétique et les intérêts hypothécaires ne pourraient plus être déduits comme actuellement.
La Fédération suisse des propriétaires immobiliers (HEV), les principaux intéressés, se montre globalement d'accord avec le projet. En revanche, les locataires et les cantons y sont fermement opposés. La révision est complètement déséquilibrée pour les locataires, selon l'ASLOCA.
Inégalité de traitement
L'association des locataires et les Verts craignent que la baisse des recettes fiscales de la Confédération, des cantons et des communes n'entraîne une diminution des prestations publiques. Ce recul aurait un impact bien plus important pour les locataires que pour les propriétaires, dont le revenu est généralement plus élevé.
Verts et ASLOCA dénoncent non seulement une inégalité de traitement, mais aussi un risque de sous-financement pour l'aide au logement. Une réforme de l'imposition du logement n'est envisageable que si elle améliore la situation économique des locataires.
La Conférence des directeurs cantonaux des finances (CDF) n'estime pas du tout nécessaire d'agir. L'imposition actuelle du logement est justifiée et équilibrée tant sur le plan constitutionnel, économique que fiscal. Le projet de réforme n'apporte aucune simplification.
Moment opportun
A l'opposé et en plus des propriétaires, le projet reçoit un fort soutien du PLR, du PDC, de l'UDC, des Vert'libéraux et du PBD. La révision tombe au bon moment, au vu des taux d'intérêt très bas. En revanche, l'ampleur des mesures de compensation prévues donne lieu à controverse.
Alors qu'il est logique pour le PLR, les Vert'libéraux et le PDC de supprimer la déduction des frais d'entretien, l'UDC y tient. L'association de la technique du bâtiment (suissetec) redoute quant à elle une incitation malsaine au travail au noir si ces déductions ne sont plus permises.
Il n'y a pas non plus d'accord sur le volet des déductions des investissements servant à économiser l’énergie et à protéger l’environnement ainsi que des frais pour les travaux de restauration de monuments historiques. On craint que cela ne mène à un désinvestissement en matière d'économie d'énergie si les coûts d'assainissement ne peuvent plus être déduits des impôts.
Entretenir le parc de logements
Le PDC, l'UDC, les Vert'libéraux et le PBD considèrent important de maintenir le parc de logements en bon état et de ne pas perdre de vue les objectifs énergétiques. La Suisse a intérêt à ce que les propriétaires investissent dans leurs appartements ou leurs maisons - pour des raisons économiques, mais aussi pour des raisons énergétiques.
Le PLR soutient quant à lui la suppression de ces déductions au plan fédéral. Les cantons doivent pour leur part rester libres d'agir à leur guise.
Intérêts hypothécaires: pas clair
Enfin, le projet de mettre un terme aux déductions des intérêts hypothécaires reste encore peu clair. Le système actuel incite à l'endettement. Pour contrecarrer cette tendance, la commission a mis en consultation cinq variantes restrictives.
La version selon laquelle les intérêts de la dette privée ne pourraient plus du tout être déduits est retenue par le PBD. Cette variante apporterait 670 millions de recettes en plus pour la Confédération et 1,4 milliard pour les cantons pour un taux hypothécaire de 3,5%. Mais cet argent manquera alors dans les ménages.
L'autre option qui remporte le plus de succès auprès du PLR et de l'UDC est celle selon laquelle les intérêts de la dette sont déductibles jusqu'à concurrence du rendement imposable de la fortune immobilière.
Il appartient maintenant à la commission de l'économie des Etats d'élaborer un projet de loi. Le Parlement dira ensuite si le débat sur l'imposition du logement aboutit à une solution ou non.
/ATS