Les contours de la rente-pont pour les chômeurs âgés se dessinent. Le National a remanié mercredi le projet drastiquement réduit par le Conseil des Etats en décembre. Les personnes en fin de droit devraient bénéficier des prestations transitoires jusqu'à la retraite.
La rente-pont fait partie d'un paquet de mesures que le Conseil fédéral a élaboré avec les partenaires sociaux pour favoriser la main d'oeuvre indigène et répondre à l'initiative UDC contre la libre-circulation soumise au vote le 17 mai. Elle ne sera utilisée que lorsque toutes les autres dispositions auront échoué, a expliqué Mattea Meyer (PS/ZH) au nom de la commission.
La rente-pont doit permettre un passage à la retraite en toute dignité à des personnes de 60 ans et plus qui n'arrivent pas à retrouver un travail. Elles ne devraient pas être précarisées en cas de perte d'emploi ni avoir à recourir à l'aide sociale jusqu'à leur retraite, a souligné Mme Meyer.
Le marché du travail est devenu plus exigeant qu'il y a trente ou cinquante ans, a relevé le ministre des affaires sociales Alain Berset. Le taux d'aide sociale a augmenté de 47% entre 2011 et 2017 pour les 60 à 64 ans. La rente-pont permettra aussi à des personnes qui ont travaillé toute leur vie d'éviter de puiser dans leur prévoyance.
Opposition UDC
Seule l'UDC a remis le projet en question. Elle est d'emblée montée au créneau en attaquant l'entrée en matière. La rente-pont part d'une bonne intention, a estimé Thomas Aeschi (UDC/ZG). Mais les personnes plus âgées veulent qu'on leur donne un travail et non des rentes. Il ne faut pas créer de nouvel instrument d'assistance.
En décembre dernier, le Conseil des Etats avait fortement affaibli le projet, en acceptant de ne libérer que 70 millions de francs, alors que le Conseil fédéral prévoyait 230 millions. Le National s'est montré plus généreux, sa version atteignant 270 millions. Quelque 6200 personnes pourront en profiter contre 4700 avec le projet gouvernemental et 1700 avec celui des sénateurs, a noté Philippe Nantermod (PLR/VS).
Dans cette mouture adoptée par 131 voix contre 57, le droit à la rente-pont ne concerne pas seulement les chômeurs dès 60 ans, la prestation est aussi accessible aux personnes arrivées en fin de droit un peu avant leur soixantième anniversaire. PLR et UDC auraient souhaité augmenter l'âge minimal à 62 ans et les Verts le rabaisser à 57 ans.
L'UDC aurait voulu comme le Conseil des Etats limiter le versement de la prestation transitoire jusqu'au moment où le bénéficiaire a droit au versement anticipé d'une rente AVS. Ce qui aurait signifié une réduction à vie de la rente versée. Par 143 voix contre 55, le National a refusé.
Ce projet est meilleur que l'alternative proposée par le Conseil fédéral et le Conseil des Etats, a estimé Philippe Nantermod. Il supprime des effets de seuils malvenus.
Pour accéder à la rente-pont, le chômeur devrait avoir cotisé au minimum durant 20 ans aux assurances sociales, dont cinq ans après 50 ans, mais sans devoir atteindre un revenu minimal. Les bonifications pour tâches éducatives ou d'assistance seraient incluses dans le calcul des cotisations à l'AVS.
Niveau des PC
Le montant des prestations serait aligné sur celui des prestations complémentaires. Le National n'a pas voulu des plafonds fixés par le Conseil fédéral et le Conseil des Etats. Il propose en outre que les frais de maladie soient remboursés séparément.
Un chômeur aurait droit à une rente si sa fortune nette est inférieure à 50'000 francs. Un couple pourrait y prétendre s'il dispose de moins de 100'000 francs.
La rente-pont ne devrait en revanche pas s'adresser aux personnes qui bénéficient d'autres solutions, comme les travailleurs du secteur de la construction qui bénéficient de la retraite dès 60 ans. Les députés ont suivi en ce sens une proposition de Fabio Regazzi (PDC/TI) par 101 voix contre 86.
Preuves requises
Le Conseil fédéral pourrait demander aux bénéficiaires de démontrer chaque année qu'ils poursuivent leurs efforts d'intégration sur le marché du travail. La gauche s'est opposée à cette mesure, estimant qu'il est difficile de créer une règle générale pour des cas particuliers.
Par 102 voix contre 92, le National a suivi l'UDC et décidé que les prestations ne s'adresseront pas à ceux déjà en fin de droit avant l'entrée en vigueur de la loi. Il a en revanche refusé d'interdire le versement des prestations à l'étranger et d'abandonner l'exonération fiscale.
L'objet retourne au Conseil des Etats.
/ATS