L'économie suisse a nettement ralenti au premier trimestre 2015. Le produit intérieur brut (PIB) réel a perdu 0,2% par rapport aux trois mois précédents. Il s'agit d'un 'recul significatif', plus marqué qu'attendu par les analystes, et conséquence du franc fort.
C'est le premier recul du PIB suisse depuis le troisième trimestre 2011. Lors du dernier trimestre 2014, la croissance avait progressé de 0,5%. En rythme annuel, elle est de 1,1%. Elle était de 1,9% au dernier trimestre 2014.
La balance commerciale des marchandises et des services a notamment livré des impulsions négatives, a indiqué vendredi le Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO). Les évolutions positives de la formation brute de capital fixe et des dépenses de consommation des ménages privés ont limité un recul plus important du PIB.
Impact sur l'économie réelle
La contraction du PIB suisse de 0,2% au premier trimestre 2015 est une conséquence du franc fort. 'La réévaluation du franc a désormais un impact sur l'économie réelle', a indiqué à l'ats Bruno Parnisari, chef du secteur conjoncture à la direction de la politique économique du SECO.
Sans être une surprise, le recul est 'significatif', selon M. Parnisari, et plus important qu'attendu par les économistes. Ils tablaient sur une stagnation de la croissance, voire un recul de 0,1%. De plus, les effets négatifs liés au franc fort étaient plutôt attendus pour les deuxième et troisième trimestres.
'C'est un résultat plus faible qu'attendu, nous sommes dans une situation de revers conjoncturel marqué', affirme Bernard Lambert, chef économiste à la division gestion de fortune de la banque Pictet.
Dégâts limités
Bruno Parnisari constate par ailleurs que le recul constaté en Suisse contraste avec l'amélioration de la conjoncture en Europe. 'Cela montre clairement que la situation monétaire a nettement freiné la conjoncture suisse'.
'La reprise dans l'Union européenne a vraisemblablement contribué à limiter les dégâts', estime de son côté Bernard Lambert.
Exportations en recul
Dans le détail, les exportations de marchandises ont reculé de 2,3%, notamment dans la chimie et la pharmacie. Les machines, les appareils et l'électronique, ainsi que l'horlogerie et la bijouterie ont tous enregistré une évolution négative.
'La réévaluation du franc a détérioré fortement la compétitivité des entreprises exportatrices suisses et, malgré la baisse des prix de vente, les volumes exportés en ont largement souffert', précise Bernard Lambert.
Bonne tenue de la consommation
Côté production, plusieurs rubriques comme le commerce (-1,9%) et l'hébergement (-3,8%) ont connu un affaiblissement conjoncturel. L'industrie manufacturière n'a pas apporté de contribution à la croissance (-0,1%). La santé (+1,6%) et la construction (+1,1%) ont par contre amené des impulsions positives, relève le SECO.
Les dépenses des ménages et des institutions privées sans but lucratif au service des ménages ont elles augmenté de 0,5%. Elles concernaient particulièrement le logement, l'énergie et la santé. Grâce aux baisses des prix et au coût du baril de pétrole, la consommation se tient bien, explique M. Lambert. Les dépenses de consommation des administrations publiques se sont enrobées de 0,1%.
Les investissements consentis en matière de biens d'équipement ont progressé de 0,5% et ceux dans la construction de 0,3%.
Tout dépendra du franc
Au SECO, on rappelle encore qu'il faut relativiser ce recul du PIB, car 'il ne s'agit que d'un trimestre, les résultats sont à prendre avec prudence', selon M. Parnisari. Difficile de dire toutefois pendant combien de temps le franc fort aura un effet négatif.
'Nous anticipons une contraction de l'activité économique en tout cas jusqu'à l'automne, avant une reprise graduelle, liée en partie à une meilleure croissance mondiale. Mais tout dépendra de l'évolution du franc suisse', avance-t-on chez Pictet.
Le SECO va publier dans deux semaines ses prévisions de croissance pour 2015 et 2016. Il les avait nettement abaissées en mars à 0,9% pour 2015. L'institut d'analyse conjoncturelle KOF de l'EPF Zurich table lui sur une croissance de 0,2% cette année. Chez Pictet, on a révisé le chiffre à la baisse, de 0,7% à 0,5%. La Banque nationale suisse (BNS) est plus optimiste avec +1%.
/ATS