Sur fond d'explosion des prix de l'énergie, le Parti socialiste suisse présente un plan de restructuration totale du marché de l'électricité. 'Il a besoin de plus de service public et de moins de spéculation', déclare le chef du groupe parlementaire Roger Nordmann.
'Nous sommes confrontés à un échec total de l'organisation de marché pseudo-libérale actuelle', déclare dimanche l'élu socialiste dans les titres alémaniques de Tamedia. Selon lui, les prix de l'électricité en Suisse n'ont, depuis 20 ans, rien à voir avec les coûts de production effectifs dans le pays.
En cause, les fournisseurs qui ont préféré s'approvisionner en électricité bon marché à la bourse internationale et vendre à profit, plutôt que d'investir dans la production durable domestique. Aujourd'hui, plutôt qu'une aide aux ménages, c'est une restructuration totale du marché de l'électricité qui s'avère urgente, affirme le conseiller national vaudois et chef du groupe socialiste.
Le PS soumettra dès la session d'automne une interpellation urgente pour exiger une révision totale de la loi sur le marché de l'électricité. Dans un document interne dont Keystone-ATS a également obtenu copie, le parti définit un plan en trois étapes.
Fonds d'amortissement
Dès 2023, le PS propose de créer un fonds d'amortissement pour les entreprises à forte consommation d'électricité. Celui-ci serait alimenté par un impôt sur les bénéfices excédentaires auprès des compagnies d'électricité - selon le document 'celles qui produisent à bas prix et vendent cher'. Le parti estime qu'il faudrait environ 500 millions de francs.
A partir de 2024, les socialistes préconisent la mise en place d'un pool national d'approvisionnement: les centrales devraient fournir du courant au coût de production. Il fonctionnerait comme un 'service de base' réglementé pour les grands consommateurs d'électricité.
A moyen terme, il s'agit surtout pour le PS d'interdire la spéculation. Pour les gestionnaires de réseaux de distribution, l'achat spéculatif d'électricité en bourse doit être 'strictement limité', peut-on lire dans le document interne. Les gestionnaires seraient alors obligés d'établir des contrats d'achat à long terme, et les producteurs de leur vendre la plus grosse part aux coûts de production.
Ouvert aux critiques
Ces propositions du PS pour transformer le marché de l'électricité ne sont pas définitives', a twitté dimanche Roger Nordmann. Le politicien lance du même coup un appel aux ménages, aux PME et aux distributeurs à partager leurs suggestions, ainsi que leurs critiques.
Sur Twitter, le débat n'a pas tardé. Le président du groupe parlementaire Le Centre Philipp Matthias Bregy a sévèrement critiqué dimanche les idées du PS, qu'il a qualifiées de 'folie'. Pour mettre en œuvre de telles revendications, il faudrait complètement interrompre le commerce, selon lui. 'Le marché de l'électricité est plus complexe que ne le présente le PS', ajoute-t-il.
Le conseiller national PLR bernois Christian Wasserfallen met lui en question l'idée d'un impôt sur les bénéfices exceptionnels. 'Personne ne sait ce qu'est un bénéfice excédentaire', écrit-il sur Twitter. En outre, les entreprises électriques appartiennent aux cantons et aux communes, relève-t-il.
Non à un plafonnement
Le chef du département valaisan de l'énergie Roberto Schmidt (Le Centre) rejette quant à lui la demande d'un plafonnement des prix de l'électricité: les entreprises sur le marché libre ont profité pendant des années de prix de l'électricité très bas, a-t-il déclaré au SonntagsBlick.
Pendant ce temps, les grands producteurs d'électricité, notamment les exploitants de centrales hydroélectriques, ont dû vendre leur électricité à perte au cours des dernières années.
M. Schmidt estime que les producteurs d'électricité devraient bien réfléchir à la manière dont ils investissent les bénéfices. Il serait difficilement compréhensible que des dividendes soient versés à grande échelle.
Le conseiller d'Etat valaisan est président de la Conférence des directeurs cantonaux de l'énergie. Celle-ci n'a pas encore pris officiellement position sur la question, a précisé Roberto Schmidt. Mais il est convaincu que d'autres cantons partagent sa position.
/ATS