Zurich disposera d'un véritable stade de football dans quelques années. Les citoyens de la ville ont approuvé dimanche un projet englobant une arène de 18'500 places, deux tours habitables de 137 mètres et 174 logements de coopérative sur le site du Hardturm.
Les Zurichois ne votaient pas sur un crédit de construction, mais sur la cession des 55'000 m2 concernés, appartenant à la ville, à des investisseurs privés dont Credit Suisse. Ils ont dit oui à 53,8% au marché passé avec ces derniers. Le taux de participation a atteint 55,9%.
Rabais sur le droit de superficie
Concrètement, la ville va octroyer un droit de superficie à prix préférentiel de 1 million de francs annuels pour la construction de 600 appartements de haut standing principalement, dans deux tours de 137 mètres. Le rendement de ces deux bâtiments permettra de financer le stade de football dont l'inauguration est prévue en 2022.
A travers ce 'deal', les citoyens ont approuvé du même coup le renoncement de la ville à des recettes de 1,7 million de francs par an. Cet argent correspond au rabais octroyé aux investisseurs sur le droit de superficie destiné à la construction des deux tours. Il constitue une participation publique indirecte au projet d'un coût global de 570 millions de francs, dont 105 millions pour le stade.
L'accord sur les tours porte sur une durée de 92 ans. Au terme de cette période, les tours seront cédées à la ville pour un montant équivalant à 80% de leur valeur future.
Une partie de la surface cédée par la ville sera attribuée à une coopérative de logement. 174 logements aux loyers particulièrement abordables et des petits commerces doivent y voir le jour. Credit Suisse s'engage en outre à céder, ailleurs, cinq bâtiments afin que la ville y réalise 125 appartements bon marché supplémentaires.
Clubs d'élite soulagés
Les deux clubs phares zurichois, le FC Zurich et Grasshopper Club, joueront dans le nouveau stade. Cette solution leur permettra de gérer conjointement l'exploitation des lieux et d'encaisser des recettes de restauration.
Actuellement, le FCZ et GC évoluent dans le stade du Letzigrund, reconstruit par la ville il y a une dizaine d'années pour accueillir l'athlétisme et des concerts en plein air. Cette situation coûte aux deux clubs des frais de loyer et les prive de rentrées supplémentaires.
Contre l'avis du PS et des Verts
Le projet était porté par l'exécutif rose-vert de la ville, convaincu par cette solution pragmatique. Au législatif, la minorité bourgeoise l'appuyait également. La gauche avait d'abord accompagné le projet avec bienveillance avant de se raviser il y a quelques mois.
Les Verts contestaient la nécessité de construire un stade de foot, de surcroît sur la friche de l'ancien stade du Hardturm, démoli en 2008. Ce site accueille en effet actuellement des jardins urbains et des événements itinérants, condamnés par le projet.
Pour le PS, le marché passé avec les investisseurs représente une 'arnaque' qui pèsera à long terme sur les finances de la ville. Les socialistes critiquaient aussi la construction d'appartements de luxe dans les deux tours. Ils ont déposé, début novembre, une initiative populaire pour la construction d'un stade par la ville, sans tours. Le parti doit décider prochainement s'il la retire.
Serpent de mer
Il n'empêche: l'ouverture du stade d'ici à 2022 n'est pas encore assurée. La construction des deux tours géantes - elles dépasseront la Prime Tower de 12 mètres - fera sans doute l'objet de recours administratifs d'opposants bien décidés à porter l'affaire jusqu'au Tribunal fédéral pour des raisons de protection du paysage.
En 2003, un stade de 30'000 places, fruit d'un partenariat public-privé, avait également été approuvé en votation, mais abandonné par la suite face aux oppositions administratives persistantes, liées notamment à sa hauteur.
Découragé, l'investisseur Credit Suisse vendait alors le terrain à la ville avec la mission d'y construire un stade de foot, avec une option de rachat si le projet n'aboutit pas d'ici à 2035. En 2013, un projet au financement purement public a été rejeté de justesse par les citoyens. L'avenir dira si le feu vert obtenu dimanche met réellement un terme à ce serpent de mer.
/ATS