Assureurs et entreprises pharmaceutiques sont divisés quant à la stratégie à adopter concernant le franc fort. Les premiers réclament que les prix des médicaments soient adaptés au taux de change actuel, alors les seconds ne veulent pas prendre de décisions trop précipitées.
Si les prix des médicaments étaient adaptés tout de suite au cours actuel, le potentiel d'économies pour le budget de la santé serait de 405 millions par année, a affirmé mardi à Berne Verena Nold, directrice de santésuisse, la faîtière des assureurs.
Santésuisse exige par conséquent un changement complet du système par une révision annuelle de l’ensemble des prix des médicaments. L'Office fédéral de la santé publique (OFSP) examine chaque année un tiers des médicaments présents sur une liste de spécialités.
Cela prend trois ans jusqu'à ce que tous les prix soient adaptés au taux de change. De plus, la Confédération ne prend pas comme référence le taux de change actuel. Elle se base sur le taux de change moyen effectif entre février 2014 et janvier 2015, soit 1,20 euro, a indiqué l'OFSP.
Baisse des primes
Or, la faiblesse de l'euro par rapport au franc suisse a fait baisser les prix de nombreux produits importés, mais pas ceux des médicaments remboursés par l'assurance-maladie. Résultat, les primes d'assurance-maladie pourraient être réduites de 125 francs par personne et par année, selon santésuisse.
Certes, mais 'la structure des coûts en Suisse n'est pas la même que dans les autres pays de l'Union européenne', a expliqué Thomas Binder, le directeur de vips, une association qui représente 70% des entreprises de la branche pharmaceutique.
'Des prix européens, mais des coûts majoritairement suisses, ceci n’est plus acceptable pour les entreprises pharmaceutiques travaillant en Suisse', a-t-il martelé. Il faut que le prix des médicaments revienne à un niveau adéquat.
Plutôt que de prendre de décisions trop précipitées, comme le demande santésuisse, il faut attendre, a estimé Thomas Cueni, secrétaire général d’Interpharma, l'association des entreprises du secteur pratiquant la recherche. Le taux de change est très volatil.
Génériques deux fois plus cher
Et Thomas Cueni de rappeler: 'les médicaments brevetés ne sont pas plus chers en Suisse qu'à l'étranger'. Depuis la dernière baisse des prix des médicaments en novembre dernier décidée par l'OFSP, l'écart de prix entre la Suisse et l'étranger est quasi nul aujourd'hui, alors qu'il était encore de 5% en 2013.
Les prix des médicaments brevetés ont certes baissé, mais les génériques coûtent par contre deux fois plus cher en Suisse qu'à l'étranger, a répondu Verena Nold. 'Il faut tenir compte de tous les médicaments', comme les génériques et les médicaments dont le brevet est par exemple échu.
Les prix des médicaments sont plus bas dans les pays où les génériques sont plus largement répandus. La Suisse devrait augmenter des parts de marché des génériques, a-t-elle poursuivi. En Suisse, cette part atteint environ 20% du marché, alors qu'elle est environ à 60% en Allemagne ou aux Pays-Bas.
Etendre la liste des pays
L'étude présentée mardi est la sixième de ce type réalisée conjointement par les assureurs et les entreprises pharmaceutiques. Les six pays de comparaison sont l'Allemagne, l'Autriche, le Danemark, la France, la Grande-Bretagne et les Pays-Bas.
La Confédération propose cependant de changer le système de fixation du prix des médicaments. Elle suggère notamment d'inclure la Belgique, la Finlande et la Suède dans la liste. Le Conseil fédéral devrait adopter un projet au printemps prochain.
Santésuisse n'y est pas favorable. La faîtière craint que la comparaison avec les trois nouveaux pays, 'tendanciellement plus chers', ne fasse augmenter les coûts en Suisse. D'après Verena Nold, il serait plus judicieux d'y ajouter l'Espagne ou l'Italie par exemple.
/ATS