Un an après l'avoir sanctionnée pour son soutien à Airbus, l'OMC a autorisé mardi l'Union européenne à prendre des mesures de rétorsion contre Washington pour ses aides à Boeing. Il s'agit d'un rebondissement de plus dans un feuilleton commercial vieux de seize ans.
'L'Union européenne peut demander à l'Organe de règlement des différends l'autorisation de prendre des contre-mesures à l'égard des Etats-Unis pour un montant ne dépassant pas, au total, 3'993'212'564 USD par an', a conclu l'arbitre de l'OMC dans un rapport de 137 pages publié à Genève.
L'UE a accueilli cette décision en appelant à 'un accord négocié' avec les Etats-Unis. 'J'ai exprimé clairement ma forte préférence pour un accord négocié avec les Etats-Unis, évitant des mesures et contre-mesures douloureuses', a dit le vice-président de la Commission, Valdis Dombrovskis, dans un communiqué.
Une solution globale
Selon lui, la dispute Airbus-Boeing pourrait être résolue 'de façon constructive, tournée vers l'avenir, en réglant la question des subventions à l'aviation civile à l'échelle de tout le secteur'.
L'UE propose 'que les Etats-Unis retirent les droits de douane qu'ils ont imposés sur le cas Airbus. L'UE s'abstiendrait alors de mettre en oeuvre ses droits de représailles et on remettrait les compteurs à zéro', a-t-il expliqué.
'Il est temps de trouver une solution qui permette de supprimer les droits de douane de part et d'autre de l'Atlantique', a de son côté réagi le président exécutif d'Airbus, Guillaume Faury.
A Washington, le représentant américain au commerce Robert Lighthizer a de son côté affirmé vouloir 'intensifier' les négociations avec Bruxelles dans le but de restaurer une 'juste concurrence'. 'Nous attendons une réponse de l'Union européenne à une récente proposition' des Etats-Unis, a-t-il assuré.
Longue liste
Dans la perspective des sanctions, l'Europe a déjà dressé une longue liste de produits qui pourraient être taxés. Avant d'imposer des contre-mesures, elle doit en faire la demande à l'occasion de la prochaine réunion de l'Organe de règlement des différends le 26 octobre.
Pourraient ainsi être visés les avions de ligne produits aux Etats-Unis, les tracteurs, mais aussi la patate douce, les arachides, le jus d'orange congelé, le tabac, le ketchup ou encore le saumon du Pacifique, selon une liste actualisée obtenue par l'AFP.
Airbus et Boeing, et à travers eux Bruxelles et Washington, s'affrontent depuis octobre 2004 devant l'OMC. En cause: les aides publiques versées aux deux groupes, jugées illégales de part et d'autre.
Droits de douane
La décision attendue mardi au profit de l'UE vient en miroir de l'autorisation accordée l'an passée aux Etats-Unis d'imposer des taxes sur près de 7,5 milliards de dollars de biens et services européens importés chaque année, la sanction la plus lourde jamais imposée par l'OMC.
Depuis, Washington inflige des droits de douane punitifs sur certaines importations de l'UE comme le vin, le fromage et l'huile d'olive, à hauteur de 25%. Des taxes douanières de 10% sur les avions Airbus ont été relevées en mars à 15%.
L'UE et certains de ses Etats membres ont fait appel en décembre d'une décision de l'OMC selon laquelle ils n'avaient toujours pas mis en conformité leurs aides à Airbus. L'examen de cet appel est bloqué, Washington refusant la nomination de juges indispensables à son fonctionnement.
'En conformité'
L'avionneur européen a depuis dit s'être mis 'en conformité totale' avec les règles de l'OMC. Les Etats-Unis affirment eux aussi s'être mis en conformité avec les règles de l'OMC sur le point qui leur vaut d'être sanctionnés mardi.
L'Etat de Washington, qui abrite de nombreuses usines de Boeing, a en effet abrogé le 1er avril une loi réduisant de 40% le taux d'imposition des sociétés aéronautiques basées sur son territoire. Une ristourne d'environ 300 millions de dollars.
/ATS