Le feuilleton pour le contrôle du groupe zougois de spécialités chimiques Sika connaît un nouvel épisode. Le conseil d'administration, réfractaire au rachat par le français Saint-Gobain, veut limiter le droit de vote de la holding familiale SWH. Cette dernière et Saint-Gobain contestent fermement.
Le conseil d'administration de Sika a lancé lundi un nouveau pavé dans la mare avant l'ouverture de la Bourse suisse, marquant ainsi une nouvelle étape de sa résistance acharnée au rachat de l'entreprise par Saint-Gobain. Il propose désormais de limiter à 5% les droits de vote de la holding familiale Schenker-Winkler (SWH).
Entêtement des dirigeants
L'organe de surveillance s'est réuni dimanche pour analyser la plainte déposée début janvier auprès de la justice zougoise par SWH dans le dessein d'obtenir la convocation d'une assemblée générale extraordinaire, a-t-il indiqué dans un communiqué estampillé Sika. Pour mémoire, la famille Burkard, via SWH, détient 16,1% du capital mais 52,4% des voix.
Le conseil d'administration de Sika affirme que plus de 35% des actionnaires soutiennent sa position. La famille Burkard/SWH forme avec Saint-Gobain un groupe d'actionnaires et exercera ainsi son droit de vote conformément aux instructions du groupe français lors de l'assemblée générale, indique l'organe de surveillance.
La pratique constitue un détournement de la limitation statutaire du droit de vote, estime le conseil d'administration.
SWH contre-attaque
La réaction de la famille Burkard, via SWH, n'a pas tardé, trois heures à peine après le communiqué des administrateurs de Sika. Selon elle, vouloir réduire son droit de vote à la limite statutaire de 5% est illégal.
Se référant aux dispositions légales, SWH a expliqué que la qualité pour demander la convocation d'une assemblée générale ne dépend pas des droits de vote, mais de la part détenue dans le capital. La holding détient 16% de ce dernier, ce qui implique qu'on ne peut lui refuser le droit de solliciter une convocation.
Ensuite, SWH répond à l'argumentaire produit trois heures plus tôt par le conseil d'administration de Sika, se référant à une expertise du professeur de droit Peter Nobel. La holding familiale se fonde pour sa part sur le cas Tecan, du nom du fabricant zurichois d'automates de laboratoires, cas tranché par la justice zurichoise en 2009.
Saint-Gobain réagit aussi
Saint-Gobain a réagi dans la foulée. Le géant industriel français a déclaré que la décision du conseil d'administration de Sika, en faveur d'une limitation des droits de vote de l'actionnaire de contrôle Burkard-Schenker, allait à l'encontre du droit des affaires en Suisse.
'Saint-Gobain a pris note des décisions du conseil d'administration de Sika', a encore indiqué le groupe français dans un bref communiqué. 'Les conseils juridiques de Saint-Gobain considèrent que ces agissements vont totalement à l'encontre de tous les principes du droit des affaires et de la gouvernance helvétiques.'
Sur les marchés boursiers, vers 10h45, l'action Saint-Gobain reculait de 1,5%, tandis que le titre Sika prenait près de 3%.
Pour rappel, Saint-Gobain a annoncé début décembre le rachat de la holding de contrôle de Sika pour 2,75 milliards de francs. Depuis, la direction générale et une partie du conseil d'administration s'entêtent à s'opposer la transaction. Le géant industriel français compte achever l'opération d'ici à la fin du premier semestre.
/ATS