Les pays qui utilisent des drones ont le devoir d'enquêter sur d'éventuelles victimes civiles et de se justifier publiquement, a affirmé à Genève l'expert de l'ONU sur la lutte contre le terrorisme Ben Emmerson. Il a émis des doutes sur la légalité de 30 frappes.
"Lors de chacune de ces frappes, en l'absence d'explication publique de la part de l'Etat responsable, le nombre de civils touchés soulève raisonnablement des doutes que l'action entreprise ait été illégale", a affirmé l'expert de l'ONU devant le Conseil des droits de l'homme.
Selon Ben Emmerson, les informations rassemblées ne suffisent pas à prouver l'existence de crimes de guerre. Par contre, les éléments recueillis sont suffisants pour "imposer à l'Etat concerné le devoir d'une explication publique sur les circonstances et la justification de l'utilisation de la force", a déclaré le rapporteur de l'ONU.
"Les Etats responsables de ces frappes ont l'obligation légale de révéler les résultats de leurs enquêtes ou d'expliquer pourquoi de telles enquêtes n'ont pas eu lieu", a-t-il ajouté.
Il a recommandé au Conseil des droits de l'homme d'organiser lors d'une prochaine session une réunion-débat pour discuter d'un cadre juridique international réglementant l'utilisation des drones dans la lutte contre le terrorisme. L'expert de l'ONU a salué au passage la décision adoptée le mois dernier par le Parlement européen, demandant à l'UE d'adopter une position commune sur l'utilisation militaire des drones.
L'expert a indiqué avoir examiné au cours des 14 derniers mois les informations crédibles récoltées sur des victimes civiles dans le cas de 37 frappes effectuées avec des drones dans diverses parties du monde. La liste a ensuite été ramenée à 30.
Selon lui, les opérations de la CIA dans les zones tribales au Pakistan ont provoqué le plus grand nombre de victimes civiles. L'expert s'est toutefois félicité du fait que ces attaques ont fortement diminué, de 128 en 2010 à 27 l'an dernier.
Par contre, la situation est "beaucoup moins rassurante" en Afghanistan et au Yémen. En Afghanistan, les victimes civiles lors d'attaques avec des drones ont ainsi triplé l'an dernier par rapport à l'année précédente.