Un gynécologue jurassien était entendu dans une affaire de viol au Tribunal de première instance à Porrentruy jeudi. L’homme est suspecté d’avoir tenté de contraindre sexuellement une patiente et de l’avoir violée. Il nie les faits.
Une victime en état d’évitement
Les faits remontent à 2006 et 2007. A l’époque, la victime présumée a consulté son gynécologue à plusieurs reprises pour des problèmes de santé chroniques. C’est lors de ces consultations que le docteur aurait tenté d’abuser d’elle et de la violer.
La victime s’est tue pendant presque dix ans, avant de finalement dénoncer le médecin. Selon l’expertise psychiatrique, elle aurait été dans un état « d’évitement » pendant toutes ces années : un processus psychologique qui l’a empêchée de parler, parce qu’elle respectait les hautes professions, soit « le médecin », mais aussi parce qu’elle avait peur des conséquences. C’est en le croisant des années plus tard et en voyant son attitude « froide » qu’elle se serait décidée à parler. Elle ne s’est pas portée partie plaignante, préférant rester témoin dans une affaire poursuivie d’office. Une longue enquête a alors eu lieu, des patientes ont été entendues, ainsi que des employées du docteur. Plusieurs d’entre elles ont décrit un homme tenant parfois des propos désobligeants et ayant des gestes déplacés. De plus, des préservatifs et du Viagra ont été retrouvés dans le cabinet du médecin, ainsi que des recherches internet à connotation pornographique. Le procureur a demandé une interdiction d’exercer pendant 3 ans et 3 ans de prison avec sursis partiel.
Preuves insuffisantes selon l’avocate du médecin
Face aux accusations, le gynécologue s’est défendu. Il a assuré toujours se cantonner à des examens médicaux, et que chaque geste entrepris est purement professionnel. Il a ajouté qu’il ne demande jamais à ses patientes de se dénuder entièrement. Quant au Viagra retrouvé dans son cabinet ? « Ce sont des échantillons. Il arrive que des femmes me demandent de leur en prescrire pour leur mari », a expliqué le médecin. Il s’est aussi défendu d’avoir consulté des vidéos pornographiques, « qui ne prouvent rien », selon lui. Des propos appuyés lors du réquisitoire par son avocate. Elle a mis en avant que les propos de la victime manquaient de détails. Elle a ajouté que les faits ne pouvaient être qualifiés de viol, parce que la victime ne faisait pas assez état de violence… élément constitutif de l’infraction. Quant aux témoignages recueillis, ils sont, pour elle, peu probants.
L’avocate du prévenu a aussi tenu à dresser le portrait de son client : un homme qui travaille beaucoup, qui s’est construit seul, et qui n’aurait certainement « pas pris le risque de tout perdre pour une pulsion ». Persuadée de l’innocence de son client, elle a plaidé l’acquittement et a demandé 5’000 francs de dommages et intérêts pour tort moral… une somme que le prévenu, s’il obtient gain de cause, aimerait reverser à une association de lutte contre les violences faites aux femmes. Le jugement sera rendu vendredi. /cto