En haut d’une passerelle métallique, Caroline Schindelholz a installé une petite table en bois et une chaise. Un bureau de travail sommaire, mais qui se marie à merveille avec les colonnes de béton et de métal de cette cathédrale industrielle que sont les Fours-à-Chaux de St-Ursanne. Sur la table, quelques traces d’encre de Chine fraîchement échappées de l’encrier de cette jeune jurassienne engagée dans les arts visuels. « Mes dessins seront sûrement empreints de ce lieu. Ça m’inspire quelque chose de paradoxal. A la fois un sentiment de liberté, mais ces architectures métalliques rappellent aussi une prison », observe Caroline. Comme elle, une quarantaine d’artistes puiseront leur inspiration dans ces immenses espaces durant les six prochaines semaines. Ils viennent de Suisse, d’Italie, de Russie, d’Afrique… Tous vont vivre là, 24 heures sur 24. Tous vont travailler, réfléchir, créer sur place. Au rythme des visites du public, des bruits et des musiques des autres artistes. C’est ça, « Les FAC ». Cette résidence artistique qui a débuté lundi et va durer jusqu’au 6 août connaît cette année sa deuxième édition. La première, en 2015, avait attiré près de 900 visiteurs sur deux mois.
Une approche non-élitiste des arts contemporains
Arts visuels, arts sonores, écriture, danse contemporaine, performances en tout genre… De nombreuses disciplines artistiques contemporaines sont représentées. Un art contemporain parfois jugé difficile d’accès et qui peut faire peur au public. Cette barrière, les organisateurs se sont justement jurés de la faire tomber. « On essaye de développer des méthodologies non-élitistes. Souvent les visiteurs ne se sentent pas légitime d’être là, du coup on passe beaucoup de temps à les rassurer. On propose des visites simples, humaines, soit basées sur l’émotion, la technique, ou plus intellectuelles selon ce qui intéresse la personne », explique Noémie Merçay, coordinatrice des FAC. Ici, le visiteur sera plongé au cœur même du processus de création plutôt que d’être confronté à une œuvre finie. « Mais on refuse un peu l’idée d’éduquer le public, on est plutôt dans un partage », précise Noémie Merçay. Pour une approche plus intellectuelle de ces arts, trois conférences seront proposées au public les 29 juin, 13 et 27 juillet. Trois soirées festives sont également au programme entre concerts, spectacles et expositions.
Une « colocation » d'artistes
Mais ce « partage » se vit aussi et surtout entre ces artistes qui ont résolument choisi de vivre pendant cette période « en colocation ». L’endroit a d’ailleurs été transformé en maison ambiance tisane-gâteau-canapé comme chez mamie. Un peu de confort pour six semaines de vie commune ne fait pas de mal. « C’est aussi un challenge d’être ici avec d’autres artistes plus expérimentés », relève Caroline qui débute sa carrière. « C’est parfois perturbant d’être là, de faire ses petits dessins dans son coin et d’avoir toute cette vie autour. Mais c’est hyper enrichissant, j’adore ! », sourit la jeune jurassienne. Elle aura également l’occasion d’expliquer son travail lors de plusieurs après-midi ouverts aux visites publiques. « Mais il y a des horaires à respecter ! Vivre ici six semaines, c’est une performance en soit. On a aussi le droit d’être tranquille quand on se balade en pyjama le matin ! », lance l’une des organisatrices. Un peu d’intimité pour six semaines de vie commune ne fait pas de mal non plus. /jpi
Programme complet et horaires sur www.lesfac.net