Un projet veut mettre en contact agriculteurs suisses et africains. Des enseignants camerounais et ivoiriens ont passé une dizaine de jours en Suisse pour visiter des exploitations agricoles et travailler sur ce projet d'échange
Mettre en contact agriculteurs de Suisse et d’Afrique. C’est le projet mené par les centres de formation agricole de l’Arc jurassien (Fondation rurale interjurassienne), du Valais (Châteauneuf) et du canton de Vaud (Agrilogie). Ce programme d’échange est également soutenu par Movetia. Depuis le début du mois de novembre, une délégation camerounaise et ivoirienne découvre le monde agricole suisse. Une dizaine d’enseignants sont venus visiter des exploitations valaisannes, vaudoises et jurassiennes. L’objectif est de s’imprégner des pratiques helvétiques pour ensuite les développer et les adapter aux réalités du terrain au Cameroun et en Côte d’Ivoire. Enseignants africains et suisses se sont ensuite mis au travail pour élaborer un module de formation commun intitulé « Compétences entrepreneuriales agricoles » qui sera dispensé en Suisse et en Afrique.
Une formation duale qui inspire
Si à priori les mondes de l’agriculture suisse et africaine sont très différents, ils comportent également des similarités selon Dao Daouda, directeur adjoint du Centre suisse de recherches scientifiques (CSRS) « Lorsque vous écoutez les jeunes qui sont installés, ils font face aux mêmes défis : problèmes de marché, accès à la formation et ce nouveau défi qui caractérise la jeunesse qui est cette relation à l’environnement et la peur d’un lendemain incertain. C’est quelque chose qui est partagé de manière transversale. » Mais Dao Daouda note également des différences importantes. « Il y a un fossé par exemple entre les moyens techniques et de production. L’intensification est très importante en Suisse. Ce n’est pas le cas en Côte-d’Ivoire. Chez nous, il y a également très peu de transformation des produits. »
Dao Daouda : « Les jeunes entrepreneurs suisses et ivoiriens font face aux même défis »
Tenir compte du contexte
Les enseignants africains se serviront de leurs observations pour tenter d’améliorer ce qui peut l’être dans leurs pays respectifs. Mais sans pour autant procéder à un copier-coller. « Il faut tenir compte du contexte dans lequel les agriculteurs ivoiriens ou camerounais vivent et travaillent, explique Louis Ndjié, directeur de l’institut agricole d’Obala. Par exemple, un entrepreneur ivoirien qui possède deux vaches peut vivre du lait qu’il produit. Il n’a pas besoin d’une exploitation plus grande. En revanche, il peut bénéficier d’une formation et d’un minimum de soutien pour s’installer. L’idée c’est d’amener nos pays à comprendre que si un jeune est bien formé, si on peut l’aider à s’installer, on peut créer des richesses avec peu de choses. »
Louis Ndjié : « L'objectif est aussi de dire à nos politiciens qu'on peut créer de la richesse avec peu de choses »
Aiguiser les compétences entrepreneuriales
Le bénéfice de cet échange n’est pas à sens unique. Les agriculteurs suisses profiteront eux-aussi de l’expérience. Au mois d’octobre 2023, 12 étudiants suisses s’en iront sur la ferme école de Bringakro en Côte-d’Ivoire. Ils y rejoindront 8 étudiants camerounais et 12 ivoiriens. Ils suivront ensemble le module de formation élaboré ce mois en Suisse. L’expérience sera ensuite reconduite en mai 2024 dans l’institut Agricole d’Obala au Cameroun. Pour Pierre-André Odiet, responsable du département formation professionnelle et continue à la FRI, cet échange permettra aussi d’aiguiser les compétences des agriculteurs suisses : « Aller voir que même dans des contextes où les conditions cadres sont réduites on peut tout de même développer une démarche entrepreneuriale. Cela doit permettre de créer ou renforcer les outils pour développer ses propres compétences »
Pierre-André Odiet : « Se confronter à un contexte différent permet de développer ses propres compétences »
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